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OPÉRETTE

Camille  Saint-Saëns  proclamait que « l'opérette est une fille de l'opéra-comique ayant mal tourné, mais les filles qui tournent mal ne sont pas toujours sans agrément. » La boutade est amusante, la réalité plus complexe.

Littré, dans son Dictionnaire de la langue française (1863-1873), donne les définitions suivantes : « Opérette : 1o Mot qui a passé de la langue allemande dans le français, et par lequel on désigne de petits opéras sans importance par rapport à l'art. 2o Aujourd'hui très généralement employé pour désigner les ouvrages joués sur plusieurs petits théâtres ou dans les salons. Étymologie : diminutif d'opéra, attribué à Mozart. »

Le Dictionnaire de l'Académie française (7e édition, 1878-1879), précise : « Composition dramatique dont l'action est gaie ou comique et la musique légère... » Il semble que ce soit la définition la plus proche de la vérité. En effet, contrairement à une opinion répandue, l'opérette n'est nullement une « descendante » de l'opéra. C'est apparemment à l'Italie que nous devons cette confusion : dès la naissance de l'opéra dans ce pays, on avait coutume, pour délasser les spectateurs, de donner en guise d'entractes des intermezzi comiques qui n'avaient rien à voir avec l'œuvre jouée. Par la suite, on a extrait ces intermezzi, on les a réunis, et c'est ainsi que l'opera buffa prit naissance au sein de l'opera seria, mais s'en détacha très vite pour former un genre à part.

Rien de tel ne peut être dit à propos de l'opérette, qui, loin d'être issue de l'opéra, a constitué, à l'origine, une réaction populaire contre l'opéra.

Les origines

Au contraire de l'opéra, qui restera toujours plus ou moins élitiste, l'opérette – par son ancêtre, le vaudeville – est issue du pavé de Paris. Au xviie siècle, ce pavé de Paris est un spectacle permanent ; jongleurs, montreurs d'ours, acrobates rejoignent de préférence la foire Saint-Germain et la foire Saint-Laurent, où les badauds trouvent toutes sortes de distractions, y compris de petits spectacles montés sur des tréteaux. Ces spectacles tiennent de la pantomime, de la chanson ou de la satire : le « chansonnier » qui s'attaque de préférence aux gens en place et qui brocarde les politiques est un type éternel en France.

Mais l'Opéra – l'Académie royale de musique –, sous la férule de Lully, obtient en 1669 un privilège exclusif qui empêche tout autre théâtre de Paris de lui faire concurrence dans le domaine de l'opéra. La Société des comédiens-français s'engouffre dans la brèche ainsi ouverte et fait interdire toute pièce parlée.

Que reste-t-il aux comédiens de la Foire ? Des procès, des interdictions, des expulsions... et des spectacles muets, limités à deux acteurs, qui n'ont de ressource que dans la pantomime, et qui, à défaut de pouvoir chanter eux-mêmes, font chanter le public. Encore faut-il que ce public connût les chansons ; on utilise alors ce qu'on appelle des timbres, c'est-à-dire des airs en vogue connus de tous et qui possèdent chacun une sorte d'« étiquette » : quand les paroles ont un double sens, on utilise un timbre qui commence par « Vous m'entendez bien » ; lorsqu'une promesse ne doit pas être tenue, c'est « Attendez-moi sous l'orme ».

Rompu à cet exercice, le public comprend parfaitement, s'amuse beaucoup, et plus encore quand on emprunte un air extrait d'un opera seria à la mode : l'ironie, la parodie, la vivacité d'esprit de ces spectacles en font le succès.

En dépit des interdictions, ces représentations s'étoffent petit à petit : on y trouve des airs nouveaux, spécialement composés, quelques danses, et un vaudeville final imité des opera buffa italiens,[...]

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Écrit par

  • : licenciée ès lettres françaises, grecques et latines, producteur délégué d'émissions musicales à Radio-France

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Média

Offenbach - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Offenbach

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