OPTIQUE ADAPTATIVE
L'OPTIQUE ADAPTATIVE : CORRIGER EN TEMPS RÉEL
L'optique adaptative est la correction en temps réel, par un dispositif optique actif, de la déformation des images induite par la turbulence atmosphérique. Cette performance technique est devenue réalité grâce aux progrès de l'informatique et des composants optiques et grâce à la compréhension approfondie des propriétés de la turbulence atmosphérique. D'abord proposée par un astronome (Horace W. Babcock) dans les années 1950, l'idée fut reprise et mise en pratique sous le sceau de la confidentialité par les militaires américains quand la technologie le permit durant les années 1980 : il s'agissait alors de concentrer le faisceau d'un laser de combat que l'atmosphère dispersait, ou bien encore de pouvoir assurer la surveillance de satellites. C'est cependant aux astronomes, particulièrement en France, que l'on doit les développements les plus décisifs de cette technique dans le domaine civil.
Le principe de fonctionnement d'un système d'optique adaptative (S.O.A.) est schématisé dans la figure. Trois ingrédients de base se retrouvent toujours dans un tel système :
– un capteur sophistiqué permettant de mesurer la déformation de l'onde ; c'est l'analyseur de surface d'onde, ou A.S.O. ;
– un composant optique « adaptatif », c'est-à-dire capable de créer une déformation contrôlée du front d'onde ; il s'agit généralement d'un miroir déformable comportant des actionneurs dont le nombre détermine la finesse de la capacité de correction ;
– un calculateur rapide et un logiciel spécialisé traduisant les mesures de déformation du front d'onde en corrections à appliquer.
Le vecteur de la mesure est toujours une source lumineuse de référence, suffisamment proche de l'objet dont on voudra former l'image pour que les rayons lumineux issus des deux sources traversent les mêmes couches turbulentes. Quand c'est l'objet visé lui-même qui sert de source de référence, une fraction de la lumière est détournée pour la mesure.
Plusieurs concepts existent pour l'analyseur de surface d'onde (A.S.O.) ; presque tous ont en commun le principe de découpage du faisceau en un nombre de cellules élémentaires, les sous-pupilles, dont chacune fournira une image de la source de référence par l'intermédiaire d'un dispositif optique, comportant souvent un réseau de lentilles. Ce découpage est rarement réalisé au niveau de la surface de l'optique d'entrée, c'est-à-dire de la pupille : difficile en effet d'imaginer un tel découpage à la hauteur d'un miroir de télescope de 8 mètres de diamètre, par exemple ; c'est plutôt à la position d'une image réduite de cette pupille que la segmentation intervient, en général grâce à un réseau de microlentilles. De la collection d'images fournies par ces réseaux sera extraite une information locale sur la partie de front d'onde délimitée par la sous-pupille. Parfois, cette information sera la déclivité, ou pente locale : c'est le principe de Shack-Hartmann, qui mesure le déplacement du centre de gravité de l'image de la source de référence. Dans un autre cas, c'est le creusement local de l'onde (sa courbure) qui est mesuré : c'est la méthode de l'analyse de courbure imaginée par l'astronome français François Roddier, où le défaut de focalisation qu'introduit la courbure de l'onde est mesuré. Dans les deux cas, c'est une dérivée de la surface d'onde qui est obtenue (au sens mathématique du mot, en l'occurrence dérivées premières et secondes, respectivement), et un premier rôle du calculateur sera de recréer par intégration et continuité la surface originale de l'onde. Les détecteurs associés à l'A.S.O. doivent dans tous les cas offrir d'excellentes performances en rapidité, car une règle généralement admise par les automaticiens impose une vitesse d'analyse dix fois supérieure à la fréquence[...]
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Écrit par
- Daniel ROUAN : directeur de recherche au C.N.R.S., membre de l'Académie des sciences
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