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ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE

Le 18 février 1934, le ministre français des Postes, Jean Mistler, signe le décret fondant l'Orchestre national, un ensemble de quatre-vingts musiciens dirigés par Désiré-Émile Inghelbrecht. En imposant l'exclusivité, le règlement de l'orchestre remettait en cause la pratique des remplacements, qui permettait aux instrumentistes de « jongler » entre le concert et l'opéra, l'enseignement et la musique de chambre, pratique usuelle dans les autres orchestres parisiens. Inghelbrecht recrute surtout de jeunes instrumentistes, encadrés par quelques « aînés » expérimentés. La moyenne d'âge, qui dépasse à peine trente ans, constitue un potentiel fantastique mais aussi une grave erreur, car la pyramide des âges, garantie d'un renouvellement progressif, n'est pas respectée.

Le premier concert se déroule dans la salle de l'ancien Conservatoire, le 13 mars 1934. Pour respecter le champ d'action des autres orchestres, les activités de l'Orchestre national étaient limitées à la radiodiffusion : il ne pouvait enregistrer de disques et le public devait être admis gratuitement. Inghelbrecht parvient en peu de temps à une certaine cohérence. Les musiciens sont habitués à préparer des programmes rapidement (deux concerts par semaine, plus les déjeuners-concerts à effectif réduit). Inghelbrecht dirige la plupart des concerts, en alternance avec Roger Désormière ou Eugène Bigot. Son assistant s'appelle Manuel Rosenthal. En 1935, Toscanini choisit l'Orchestre national pour les deux concerts qu'il dirige à l'Opéra. C'est la première apparition de l'orchestre au premier plan de la vie symphonique parisienne.

Plus de la moitié de l'orchestre est mobilisée en 1939. L'autre part le 26 octobre pour Rennes, où Inghelbrecht parvient à donner des concerts dans le théâtre municipal, réquisitionné. Il crée un bulletin de liaison, le Courrier de l'Orchestre national, qui permet de garder le contact avec les mobilisés. Mais après le bombardement de Rennes, le 16 juin 1940, l'orchestre cesse d'exister, pour se reconstituer en zone libre, en mars 1941. Le gouvernement de Vichy choisit de l'installer à Marseille, en excluant les musiciens juifs ; parmi eux, la violoniste Jeanne Haskil, sœur de Clara. Le 1er mars 1943, l'orchestre regagne Paris, où il fête son millième concert. Mais il est difficile, pour un ensemble subventionné, de garder ses distances vis-à-vis des autorités d'occupation. À la Libération, Inghelbrecht, écarté, est remplacé par Manuel Rosenthal.

Otto Klemperer - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Otto Klemperer

Henry Barraud, directeur de la chaîne nationale à la radio, rebâtit l'orchestre en quelques années et l'inscrit dans le cadre de la nouvelle direction musicale de la radio. Il engage Rosenthal comme chef permanent ; celui-ci pratique une programmation résolument novatrice : musique contemporaine, cycle Stravinski en 1945 et retour en grâce des musiciens français mis à l'index. Les premiers chefs invités sont Désormière, Jean Martinon et André Girard, suivis, en 1946, de Otto Klemperer, Paul Paray, Charles Münch, Paul Kletzki... Le statut aménagé permet à l'orchestre de donner des concerts publics, d'enregistrer des disques et d'effectuer des tournées. Le premier déplacement a lieu à Berlin en 1946, suivi d'une série de concerts historiques à Londres, en juin-juillet de la même année. Les premiers disques officiels sont enregistrés sous la direction de Paul Kletzki en 1947 (Tableaux d'une exposition de Moussorgski-Ravel et Boléro de Ravel). Mais l'orchestre ne se découvre une stature internationale qu'au cours de sa première tournée en Amérique du Nord, à l'automne de 1948 : pendant plus de deux mois, les musiciens donnent trente-neuf concerts aux États-Unis et au Canada sous la baguette de Charles Münch, qui devient vite leur idole.[...]

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Médias

Otto Klemperer - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Otto Klemperer

Kurt Masur 
 - crédits : S. Gusov/ Courtesy Masur Music international Inc.

Kurt Masur 

Autres références

  • BARRAUD HENRY (1900-1997)

    • Écrit par
    • 843 mots

    L’homme de radio exceptionnel qu’était Henry Barraud a jeté une ombre préjudiciable sur le compositeur. Pendant une vingtaine d’années, il a en effet présidé, avec un sens de l’engagement personnel qui laissait peu de place à ses propres activités créatrices, aux destinées musicales de la Radiodiffusion...