ORDRE PUBLIC
Le caractère d'ordre public
La mesure de police administrative, à but d'ordre public, ne se rencontre pas qu'en droit administratif, puisqu'on trouve dans le Code de procédure pénale, par exemple, la détention provisoire admise, notamment, « lorsque cette détention est nécessaire pour préserver l'ordre public du trouble causé par l'infraction » (art. 144), la publicité des débats écartée par le huis clos si elle doit être « dangereuse pour l'ordre ou les mœurs » (art. 306), la possibilité d'un pourvoi en cassation déclaré immédiatement recevable, par exception, « dans l'intérêt de l'ordre public » (art. 570) ou le renvoi d'une affaire, d'une juridiction à une autre, ordonné « pour cause de sûreté publique » (art. 665).
Il existe néanmoins une autre fonction de la notion d'ordre public, que le droit administratif n'ignore pas, et qui connaît dans les autres branches du droit un développement remarquable. Dans les domaines les plus variés, en effet, il existe des règles de droit dites d'ordre public, à l'application desquelles il est interdit de déroger, sous la menace de sanctions ou la garantie de facilités procédurales également caractéristiques.
L'interdiction de déroger
Le principe fondamental est posé par l'article 6 du Code civil, d'après lequel « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes mœurs » ; d'où il résulte, par exemple, que la cause d'une obligation est illicite « quand elle est contraire aux bonnes mœurs ou à l'ordre public » et que l'obligation, en ce cas, « ne peut avoir aucun effet » (art. 1131 et 1133).
Le domaine d'application de ce principe est très vaste. En effet, à côté d'un ordre public civil, concernant principalement l'intégrité corporelle, la liberté et la condition juridique des personnes, on a vu se développer un ordre public monétaire, un ordre public fiscal et un ordre public économique, qui prend une extension toujours plus grande.
En droit civil ou commercial, ou en droit du travail, l'ordre public se manifeste par l'interdiction de déroger par des actes juridiques à l'application de la règle d'ordre public. En droit international privé, au contraire, cette même règle est reconnue d'ordre public pour écarter le jeu des effets que devrait normalement produire en France non seulement l'expression d'une volonté privée, mais aussi bien l'application d'une loi étrangère ou un acte quelconque d'une autorité étrangère.
En droit administratif, la notion d'ordre public joue un rôle analogue, mais adapté, comme en droit international privé, aux régimes et aux situations en cause. Il y est admis qu'il est des règles s'imposant impérativement avec une force particulière. C'est ainsi qu'une disposition législative déclarant qu'une mesure administrative « ne pourra faire l'objet d'aucun recours » est comprise comme n'excluant pas, par elle-même, la possibilité d'un recours pour excès de pouvoir, fondé sur un principe d'ordre public. On peut dire que l'ordre public, en droit administratif, a pour effet de donner une force exceptionnelle à certains principes généraux du droit.
En droit pénal ou criminel, on doit dire que tout est d'ordre public, en ce sens que – sauf le cas où la définition de l'infraction comprend le non-consentement de la victime (cas du vol, du viol, etc.) – il n'est pas possible de consentir à l'accomplissement de l'infraction pénale, ni de renoncer préventivement à en poursuivre réparation. Tout ce que la loi pénale incrimine est d'ordre public, et la remarque est d'une grande importance.
Si la rigueur de ses sanctions[...]
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Écrit par
- Robert VOUIN : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris
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