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ORDRE SYMBOLIQUE

Ordre symbolique et désir

Jacques Lacan fera son miel de cette dimension inconsciente d'une structure, qui se définit chez lui expressément comme un « ordre » : « La découverte de Freud est celle du champ des incidences, en la nature de l'homme, de ses relations à l'ordre symbolique » (Écrits, 1966). La référence à la langue est toujours présente, puisqu'il s'agit de réinterpréter les catégories freudiennes de condensation et de déplacement à la lumière de catégories proprement linguistiques issues de Roman Jakobson, celles de métaphore (substitution) et de métonymie (combinaison). Si l'on peut parler d'ordre, c'est aussi parce qu'il s'agit de distinguer le symbolique des deux autres catégories essentielles : l'imaginaire, comme lieu de l'illusion constitué par l'identification primordiale, et le réel, comme reste échappant à toute symbolisation. Mais Lacan ne se contente pas de reformuler l'inconscient sous une forme linguistique (selon la célèbre formule « l'inconscient est structuré comme un langage »). On peut retrouver une dimension culturelle dans la problématique lacanienne. L'ordre symbolique, c'est certes le défilé des signifiants qui conditionne tout sujet, mais la notion d'ordre renvoie aussi aux structures de la parenté : si la chaîne des signifiants conditionne le désir, c'est aussi parce qu'elle s'ordonne autour de la loi de l'interdit de l'inceste.

Chacun de ces auteurs s'efforce de définir la spécificité de l'être humain comme être de symboles. Pour Cassirer, l'homme est source des différents mondes symboliques. Pour Lévi-Strauss, l'homme est être d'échange, les différents systèmes s'articulant à partir d'une logique qui est celle du langage, logique essentiellement inconsciente. Chez Lacan, la question porte sur le désir : l'ordre symbolique fait de l'homme un être de désir parce que la logique du langage est une logique du manque. Mais, au-delà de ces différences, on trouve une question sous-jacente : plus que le langage, le modèle d'ordre symbolique est représenté par les mathématiques (la « caractéristique universelle » de Leibniz pour Cassirer, l'analyse combinatoire pour Lévi-Strauss, la logique mathématique pour Lacan). La question d'une symbolique fondamentale renvoie au paradoxe suivant : les formes de signification trouvent leur fond dans la forme la plus dénuée de signification.

— Alexandre ABENSOUR

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Écrit par

  • : agrégé de philosophie, psychologue au centre médico-psychologique de Villeneuve-Saint-Georges