ORGANON, Aristote Fiche de lecture
Dans l'œuvre immense qui nous reste d'Aristote (385 env.-322 av. J.-C.), ou qui est publiée sous son nom, on peut distinguer trois ensembles : les écrits qui relèvent directement de la connaissance scientifique (dont De l'âme) ; ceux qui traitent plutôt des conduites humaines (dont l'Éthique à Nicomaque) : vie de la cité, principes de l'action, et ce que nous pourrions appeler culture (ainsi le théâtre, objet principal de la Poétique) ; enfin les écrits qui s'intéressent non aux contenus en tant que tels mais à leurs modes d'expression. Cette répartition est grossière : par exemple l'éloquence peut être envisagée comme technique de persuasion ; ou du point de vue d'une éthique de l'orateur ; ou enfin dans le cadre d'une science – que ce soit la science des passions ou bien celle de l'argumentation. En outre, l'étude formelle du raisonnement peut être considérée comme un préalable à toute connaissance : c'est le sens du titre d'Organon, qui signifie « instrument ». La tradition rassemble ainsi des textes en réalité très divers, écrits à des époques différentes et qui ne sont probablement pas tous de la main du Stagirite ; tels quels, ils n'en constituent pas moins l'acte de naissance de la logique – autre titre sous lequel on les a réunis.
Une science du penser
Le premier des six traités de l'Organon : les Catégories (Katègoriai) se présente comme une analyse du langage (ordonner en classes tout ce qui peut être prédiqué d'un sujet), mais aussi, par voie de conséquence, comme une investigation des sens de l'être (la substance, ousia, et ses attributs). De l'interprétation (Peri hermeneias) passe à une étude de la proposition, préalable aux Analytiques (Analutica), qui étudient la proposition démonstrative. Les Premiers Analytiques ayant permis de dégager la structure formelle de toute démonstration (le syllogisme), le traité majeur, les Seconds Analytiques, explore ce qui apparaît comme la condition d'une véritable science, assurée de ses modes de déduction : la vérité des prémisses du syllogisme. La connaissance scientifique se définit comme connaissance des causes, son approche formelle vise à distinguer le démontrable (théorèmes) et l'indémontrable (axiomes), ce qui relève de l'enchaînement causal et ce qui relève des principes premiers.
Les deux derniers traités, les Topiques (Topika) et les Réfutations sophistiques (Sophistikoi elenchoi), se rapprochent plus de la Rhétorique, c'est-à-dire d'une étude de l'argumentation en situation : la maîtrise du syllogisme y apparaît plutôt comme un art, une technique qui permet de triompher d'un adversaire. Il y a ainsi des « lieux » du dialogue (topoï, d'où le titre de Topiques), des réserves d'arguments dont la connaissance ordonnée permet de réfuter plus aisément son contradicteur : les Réfutations sophistiques étudient en particulier les faiblesses des arguments employés par les sophistes.
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Écrit par
- François TRÉMOLIÈRES : professeur de littérature française du XVIIe siècle, université Rennes-2
Classification
Média
Autres références
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NOVUM ORGANUM (F. Bacon)
- Écrit par Michel MALHERBE
- 781 mots
Le philosophe anglais Francis Bacon (1561-1626), au terme de plusieurs ébauches, fait paraître en 1620 son ouvrage le plus célèbre, le Novum Organum(c’est-à-dire « Le nouvel instrument »). Son ambition est de fournir une nouvelle logique pour la science à venir et par là même – comme le suggère...