- 1. Les indices géologiques
- 2. L'eau et l'environnement de la Terre primitive
- 3. Une vie primitive minérale
- 4. Une vie primitive organique et asymétrique
- 5. L'origine de l'homochiralité
- 6. Les ingrédients d'une soupe primitive organique
- 7. Des molécules organiques d'origine extraterrestre ?
- 8. Une vie primitive cellulaire
- 9. Une vie primitive autocatalytique
- 10. Réactions autocatalytiques sur des surfaces minérales
- 11. Bibliographie
ORIGINE DE LA VIE
L'origine de l'homochiralité
La chimie organique fournit des molécules carbonées asymétriques, mais, en l'absence de forces physiques asymétriques fortes, les énantiomères L et D d'une même molécule asymétrique sont produits en égale abondance. On obtient un mélange dit « racémique » (de racemus, « raisin ») en souvenir de l'analyse de l'acide tartrique racémique effectuée par Pasteur en 1850 (il démontra que ce composé ne dévie pas la lumière polarisée, car il est composé, en parties égales, d'une forme qui dévie la lumière polarisée à droite et d'une forme qui la dévie à gauche).
On distingue essentiellement deux théories pour expliquer l'émergence de composés homochiraux. La première fait appel à des fluctuations dues au hasard. La seconde fait appel à une asymétrie physique de la Terre, voire de l'Univers.
Les tenants de la théorie des fluctuations aléatoires arguent du fait qu'un mélange racémique n'est jamais exactement équilibré. Si le nombre de molécules est grand, des fluctuations peuvent favoriser l'une des formes, au hasard. Par exemple, dans une population de 10 millions de molécules (cellule simple d'algue bleue, par exemple), la probabilité de trouver un excès de 0,02 p. 100 en l'une des formes est de 50 p. 100. En théorie, ce léger excès peut être amplifié par des mécanismes autocatalytiques. Le chlorate de sodium fournit une belle illustration expérimentale. Les édifices cristallins de ce sel sont asymétriques bien que les molécules qui les constituent ne soient pas chirales. Lorsque les cristallisations s'effectuent dans une solution au repos, un nombre égal de cristaux (+) et (—) sont formés pour chaque échantillon. En revanche, lorsque la solution est soumise à un tourbillon, 99,7 p. 100 des cristaux d'un échantillon ont la même chiralité, soit (+), soit (—). Le premier germe asymétrique formé communique son asymétrie aux autres molécules (on parle alors d'ensemencement autocatalytique). Le quartz offre un autre exemple de rupture de symétrie. À l'état fondu, il ne présente pas d'asymétrie. À l'état cristallisé, il existe sous deux formes spéculaires (+) et (—). Le quartz (—) absorbe préférentiellement la L-alanine, un acide aminé protéique, avec une préférence pouvant aller jusqu'à 20 p. 100. Il existe bien des régions où le quartz (—) prédomine, mais l'examen attentif de tous les échantillons de quartz collectés de par le monde révèle une répartition rigoureusement équitable entre quartz (—) et quartz (+). Dans ces conditions, il est difficile d'attribuer au quartz un rôle déterminant dans le choix des acides aminés L.
La seconde théorie fait appel à une asymétrie fondamentale de la matière. On sait depuis les années 1950 que le principe de parité de Leibniz est violé dans le cas des interactions atomiques faibles. D'une manière générale, un électron possède une hélicité « droite » lorsqu'il se déplace dans la direction de son spin ; son hélicité est « gauche » lorsqu'il se déplace dans le sens opposé à son spin. Les deux hélicités participent à égalité aux interactions fortes, électromagnétiques et gravitationnelles. En revanche, les forces faibles privilégient les électrons gauches, comme le montrent les expériences utilisant la radioactivité du cobalt 60, dont les noyaux se désintègrent en émettant des rayons β (électrons), des neutrinos et des antineutrinos. On a bien sûr essayé d'exploiter cette asymétrie fondamentale pour expliquer l'homochiralité du vivant. Les électrons β sont trop énergétiques pour être utilisés directement dans des réactions chimiques. Ralentis par une cible, ils émettent un rayonnement γ, lui-même polarisé circulairement, qui est utilisé pour dégrader sélectivement des mélanges racémiques d'acides[...]
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Écrit par
- André BRACK : directeur de recherche au C.N.R.S.
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