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ORIGINE DE LA VIE

Une vie primitive cellulaire

Pendant des décennies, les chimistes se sont évertués a reconstituer en laboratoire les molécules indispensables au fonctionnement d'une cellule contemporaine : les enzymes, les lipides et les acides aminés.

Les enzymes

Dans une cellule contemporaine, la copie de l'information contenue dans l'ADN est assurée par des protéines chimiquement actives, les enzymes. Celles-ci peuvent être comparées à des mots constitués à partir de vingt lettres différentes, les acides aminés. Les « mots » des enzymes contiennent en moyenne près de deux cents lettres. Les vingt acides α-aminés utilisés par les enzymes, de type NH2-CHR-COOH, comportent une fonction amine NH2 et une fonction acide carboxylique COOH séparées par un seul atome de carbone. Ils diffèrent par la nature du substituant R. Celui-ci porte quelquefois une fonction chimiquement active, siège d'une activité catalytique. Les acides ω-aminés, ayant plusieurs atomes de carbone entre les fonctions amine et acide carboxylique, et les acides aminés disubstitués n'entrent pas dans la composition des enzymes. De plus, celles-ci n'utilisent que les énantiomères L des acides α-aminés.

Une enzyme résulte de l'assemblage d'acides α-aminés par élimination d'une molécule d'eau entre deux acides aminés dans un milieu essentiellement aqueux (phénomène de condensation). La chaîne ainsi formée adopte des conformations rigides (hélices α et feuillets β), elles-mêmes asymétriques, qui jouent un rôle essentiel dans les fonctions de catalyse.

Les acides aminés peuvent être synthétisés en laboratoire dans des conditions simples en utilisant diverses sources d'énergie, comme le rayonnement ultraviolet, les rayons X, la chaleur ou les décharges électriques. Des acides aminés ont également été observés dans certaines météorites et micrométéorites carbonées : on y trouve des acides α-aminés protéiques ainsi que des acides aminés non protéiques (acides ω-aminés et acides aminés disubstitués).

La chimie des peptides offre toute une panoplie d'agents d'activation qui permettent de condenser les acides aminés dans les solvants organiques. Dans l'eau, le nombre de ces agents est beaucoup plus restreint, surtout si on se limite aux agents ayant pu être présents sur la Terre primitive. Les carbodiimides, R-N=C=N-R, qui sont couramment utilisées en milieu organique, peuvent être employées dans l'eau à condition de choisir judicieusement les substituants et les conditions expérimentales. Elles ont permis de synthétiser dans l'eau de longs peptides contenant jusqu'à trente acides aminés. La carbodiimide le plus simple, H-N=C=N-H, peut être considérée comme une forme tautomère du cyanamide, H2N-CN, présent dans le milieu interstellaire. En fait, le cyanamide n'est pas stable et forme un dimère, le dicyandiamide, H2N-C(=NH)-NH-CN, qui est aussi réactif que la carbodiimide. Des peptides ont été obtenus à l'aide de cyanamide et de dicyandiamide. Cependant, les réactions sont très lentes et ne permettent pas d'aller au-delà d'un peptide formé de quatre acides aminés (tétrapeptide). Le tétramère de HCN, le diaminomaléonitrile, NC-C(NH2)=C(NH2)-CN, permet d'obtenir 3 p. 100 de dipeptide glycine-glycine.

Les surfaces minérales peuvent être utilisées pour condenser les acides aminés dans l'eau. En solution aqueuse homogène, l'anhydride mixte alanyladénylate polymérise partiellement, mais la réaction de désactivation par hydrolyse constitue la réaction prépondérante. En présence d'argile, par exemple de montmorillonite, la réaction d'hydrolyse est supprimée, et on observe la formation de longues chaînes de polymères d'alanine. Lorsqu'un mélange de glycine et de kaolinite ou de bentonite est soumis à des cycles d'humidification et de déshydratation[...]

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