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ORLAN (1947- )

L'artiste française Orlan, reconnue internationalement pour ses actions et performances ayant trait à l'« art corporel » (ou body art), s'exprime notamment à travers la photographie, l'art vidéo, le multimédia et la sculpture interactive. En 1977, elle se fait connaître d'un large public en se transformant durant le temps de la Foire internationale d'art contemporain (F.I.A.C.) de Paris en machine à sous du baiser à 5 francs (Le Baiser de l'artiste). Dissimulée en partie dans une coque représentant photographiquement son buste dénudé et faisant office de distributeur automatique, elle offre là une performance à la subversion participative. Le corps qui vend du plaisir, le corps qui se libère de la morale, le corps qui se mesure à l'espace social s'engagent dans la critique des stéréotypes féminins, en utilisant une énergie libératrice puisée dans l'ironie et le jeu.

Considérée dans la perspective de l'art corporel, l'œuvre d'Orlan montre très vite sa nature différente. En écho à l'œuvre du Bernin, le travail accompli de 1978 à 1988 sur l'iconographie baroque (Le Drapé-le Baroque ; Madone en extérieur ; Sculptures de plis) inscrit ses performances entre affirmation des mythes fondateurs d'un art judéo-chrétien et goût profane du travestissement, capable à l'occasion d'évoquer le transsexualisme. Il s'agit en premier lieu, dans ses scénographies théâtralisées, d'une réflexion sur le pouvoir transgressif du corps. Cependant, ses vierges noires brandissant un chevalet blanc, ses vierges blanches au sein découvert, ses madones en skaï noir hissées sur des récepteurs vidéo doivent plus à l'érotisme extatique d'une tradition picturale qu'à une réflexion – commune aux acteurs de l'art corporel – sur la nature du corps telle qu'une société peut l'occulter ou l'opprimer.

Corps étalon, corps transfiguré

Née Paulette Du Brouet [Mireille Suzanne Francette Porte] le 30 mai 1947 à Saint-Étienne, Orlan réalise ses premières actions dans sa ville natale, en 1965, en se déplaçant au ralenti selon un itinéraire urbain très fréquenté. Cet exercice de la lenteur étudiée, Or-lent, affirme contre le monde extérieur une temporalité qui lui est propre. L'usage du corps comme outil de connaissance va trouver un prolongement dans les MesuRages, où les marques à la craie portées sur le sol étalonnent à partir de son corps la distance entre deux murs, deux points, deux percées urbaines (place Saint-Pierre à Rome, 1974 ; rues passantes de Nice, 1976 ; Centre Georges-Pompidou à Paris, 1977).

Adepte d'une « surexposition » théorisée, Orlan fait de son corps un instrument pour lequel elle invente au cours des années des poses, des rituels, mais également des fictions relevant du culte de la métamorphose.

Pour cette artiste, la déconstruction de l'identité est devenue la question cruciale d'une esthétique pariant sur l'artifice. En décidant, de 1990 à 1997 lors de neuf opérations, d'utiliser la chirurgie esthétique comme un outil artistique, elle traite la salle d'opération à la façon d'un atelier personnel. Faisant entrer des caméras, lisant des textes de Julia Kristeva, de Michel Serres ou d'Antonin Artaud, programmant des retransmissions vidéo des gestes chirurgicaux, elle projette son visage refiguré à l'aide de prothèses dans une sorte de fiction qui aurait pour décor un bloc opératoire et comme profondeur de champ une multiplicité de récits. Ses opérations radicalisent avec insolence l'abolition des frontières entre sphère publique et sphère privée. Le corps incisé, transformé, ce « ready made modifié », dépose son origine pour se présenter comme un organisme à expérimenter. Faisant en sorte qu'il « redevienne la propriété de celui qui l'habite », préalablement à ses opérations, Orlan[...]

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Écrit par

  • : critique d'art, commissaire d'expositions
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Autres références

  • BODY ART

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