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OROMO

Les Oromo dans l'histoire éthiopienne

Fréquemment désignés par le nom à connotation péjorative de Galla, les Oromo ont longtemps été dépeints, dans la littérature historique des chrétiens d'Éthiopie ou dans les récits de voyageurs européens, comme des guerriers redoutables, des brigands, des rustres, des païens... En un mot, des barbares. Cette image tient aux conditions de leur apparition sur la scène historique éthiopienne.

Les premières mentions historiques des Oromo datent du milieu du xvie siècle, après la guerre dévastatrice menée par une coalition de principautés musulmanes contre le royaume chrétien d'Éthiopie. Aux confins méridionaux de cette zone de conflit, les Oromo commencent par occuper des territoires fragilisés et désorganisés. Mais il ne s'agit pas d'un simple mouvement d'expansion de nomades sur des terres disponibles. Les Oromo procèdent à une invasion massive et organisée. Ils suivent plusieurs directions selon des lignes de scission clanique. En quelques décennies seulement, ils encerclent les centres de pouvoir chrétiens et musulmans. Leur rapidité et leur combativité déstabilisent les armées adverses. À l'est, les musulmans sont submergés. À l'ouest, les chrétiens se retranchent derrière la profonde vallée du Nil, qui forme une ligne de front que les Oromo ne parviennent pas à franchir.

Progressivement, entre le xviie et le xviiie siècle, les Oromo s'installent sur les territoires conquis. Ils se sédentarisent sur des terres agricoles tout en développant une économie mixte où l'élevage tient une place importante. Les sociétés autochtones leur servent de main-d'œuvre. Celles-ci sont assimilées dans la structure sociale oromo et sont assignées à des statuts subalternes. En absorbant d'autres cultures et en pratiquant de nouvelles activités, les Oromo se transforment et se différencient. L'organisation en classes générationnelles s'efface et laisse la place à des chefferies héréditaires.

Étant très morcelées et concurrentes entre elles, ces chefferies oromo ne présentent pas un front uni face au pouvoir impérial chrétien qui se reconstitue au milieu du xixe siècle avec le projet de reconquérir des territoires perdus depuis plusieurs siècles. En cinquante ans, les territoires oromo se soumettent les uns après les autres à la couronne éthiopienne, certains en négociant les conditions de leur intégration, d'autres après avoir résisté.

Au cours du xxe siècle, l'État éthiopien veut parachever sa construction en unifiant l'espace national. Cela passe notamment par l'imposition de la langue amharique à tous les échelons de la société. Par leur nombre, les Oromo sont les premiers visés et ils subissent avec amertume le dénigrement de leur langue et de leur culture. Pour faire valoir une dignité égale, mais distincte, ils se rassemblent dans des mouvements culturels et politiques. L'abandon de l'usage de la dénomination péjorative « Galla » est l'une de leurs premières exigences. Elle sera satisfaite en 1979 par le régime révolutionnaire, pour faire acte de reconnaissance de la diversité culturelle de l'Éthiopie. Mais les revendications d'autonomie culturelle et économique des Oromo seront combattues en tant qu'atteintes à l'unité nationale.

Le mouvement nationaliste oromo, préfiguré par des rébellions locales sous le régime impérial, s'organise en Front de libération (Oromo Liberation Front, O.L.F.) dans l'atmosphère militante de la révolution marxiste éthiopienne de 1974. Il se militarise ensuite pour faire face à la radicalisation de la junte au pouvoir. Cette lutte est soutenue par le Soudan et la Somalie, autorisant l'installation à leurs frontières de camps de réfugiés oromo, qui servent de bases arrière de l'O.L.F. Des intellectuels oromo en exil en Amérique du Nord[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en anthropologie et en histoire au Centre d'études africaines, École des hautes études en sciences sociales

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  • SOMALIE

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    • 7 médias
    ...perses et indiennes. La situation à l'intérieur des terres est plus mystérieuse. Au nord, selon les traditions orales, les Somali auraient repoussé les Galla, terme désignant généralement les Oromo. Mais cette hypothèse est discordante avec ce que l'on sait par ailleurs des origines plus méridionales...