ORPHISME
L'orphisme est essentiellement un mouvement de protestation religieuse qui surgit dans la Grèce du vie siècle avant notre ère et se rattache à Orphée, le maître des incantations, l'enchanteur légendaire d'origine thrace. Par son genre de vie et par son système de pensée, ce mouvement sectaire se caractérise par un refus de l'ordre social solidaire du système politico-religieux organisé autour des Olympiens. Le mysticisme orphique n'est pas la quête d'un absolu sans référence historique : c'est une mise en question systématique de la religion officielle de la cité grecque. Vers la fin du ive siècle, l'orphisme se vide sans doute pour une part de sa vertu contestataire, il se transforme alors en un large courant de littérature philosophico-religieuse.
Les orphéotélestes
À première vue, les disciples d'Orphée paraissent aussi insaisissables que leur maître dont la biographie se perd dans le mythe. Les modernes en ont souvent conclu que l'orphisme était une religion sans culte et sans pratique, oubliant ainsi qu'un trait fondamental de celui qui pratique le genre de vie orphique (bios orphikos) est d'être d'abord un individu marginal, un errant séparé du corps social. Jusqu'à l'époque de Théophraste, les orphéotélestes – les initiateurs orphiques – se confondent plus ou moins avec ces purificateurs et ces devins ambulants voyageant de cité en cité et proposant aux hommes leurs recettes de salut, à la manière des démiurges qui, à l'époque archaïque, promènent par le monde leurs savoirs et leurs habiletés. Dans La République, Platon parle avec mépris de ces individus qui font état d'une foule de livres de Musée et d'Orphée, sur l'autorité desquels ils règlent leurs sacrifices, se flattant d'obtenir, pour les simples particuliers et même parfois pour des cités, « absolution et purification » de fautes et d'injustices anciennes. Mais ces disciples d'Orphée ne se présentent comme des purificateurs et des spécialistes de l'initiation que parce que leur genre de vie les qualifie singulièrement pour remplir ces fonctions.
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Écrit par
- Marcel DETIENNE : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
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