NIEMEYER OSCAR (1907-2012)
Un créateur de formes
L'ascension de Niemeyer fut extrêmement rapide ; il la dut en partie à l'aide dévouée que lui apporta Costa, dès que celui-ci fut persuadé du talent de son jeune collaborateur. Costa n'hésita pas en effet à s'effacer à diverses reprises pour fournir à Niemeyer des occasions de s'affirmer : refus du premier prix décerné lors du concours pour le pavillon du Brésil à l'Exposition internationale de New York en 1939 et élaboration en commun d'un nouveau projet ; abandon en 1940 de la direction du groupe d'architectes responsables du ministère de l'Éducation pour permettre à Niemeyer d'assumer cette charge ; choix de ce dernier pour construire le « Grand Hôtel » d'Ouro Preto (1938-1940), alors que les fonctions de Costa au service des Monuments historiques créé en 1937 et les servitudes imposées par cette ville-musée du xviiie siècle semblaient logiquement le désigner pour cette tâche.
La grande chance de Niemeyer fut cependant de ce voir offrir de 1941 à 1944 par le maire de Belo Horizonte, Juscelino Kubitschek, la construction d'une série de monuments de prestige destinés à lancer une vaste opération immobilière dans le futur quartier de Pampulha, situé hors de la ville. Le programme, qui comprenait un casino, un club nautique, un restaurant populaire, un hôtel (non réalisé) et une chapelle, convenait particulièrement bien à Niemeyer du fait de l'absence de contraintes. L'absolue liberté dont il disposait lui permit de créer des bâtiments originaux, d'autant plus impressionnants qu'ils restèrent isolés au bord d'un lac artificiel puisque les lotissements prévus ne furent pas construits. Cette entreprise marqua également le début d'une entente profonde entre l'homme politique ambitieux, passionné de construction, et l'architecte plein d'imagination. La rencontre ne devait cesser de porter ses fruits, tout au long de la carrière de l'un et de l'autre, aboutissant à l'apogée de Brasília. Niemeyer lui rend hommage avec le mémorial J. Kubitschek (1980-1981).
Bien que se réclamant officiellement du mouvement rationaliste, Niemeyer ne tarda pas à faire porter l'essentiel de ses recherches sur l'aspect formel de la composition. Estimant que l'architecture de xxe siècle ne serait digne de ce nom que si elle savait exploiter la plasticité de matériaux nouveaux et notamment la malléabilité du béton armé, il s'attacha à mettre au point des structures capables de valoriser l'esthétique des bâtiments (pilotis en V, arcs, voûtes, rampes), il inventa des volumes neufs ou procéda par combinaison d'éléments simples empruntés à un vaste répertoire dont la source fut souvent l'œuvre de Le Corbusier. Les commandes affluèrent à Rio de Janeiro (Banque Boa Vista, 1946) dans l'État de São Paulo (Centre technique aéronautique de São José dos Campos, 1947 ; ensemble du parc d'Ibirapuera à São Paulo, 1951-1954) ou dans celui de Minas Gerais dont Kubitschek fut gouverneur pendant quatre ans (hôtel, école et club de Diamantina, 1950-1951 ; lycée de Belo Horizonte, 1954). L'emploi fréquent des courbes a frappé bien des critiques qui y ont vu une tendance néo-baroque, mais cette opinion est discutable : malgré quelques caprices comme l'utilisation de la forme libre pour le dessin de sa propre maison à Rio de Janeiro (1953-1954) et un dynamisme contenu, l'architecture de Niemeyer est restée marquée par la clarté et l'équilibre.
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Écrit par
- Yves BRUAND : professeur d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail, archiviste-paléographe, docteur ès lettres
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