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OSTROGOTHS

L'art ostrogothique avant sa « phase italienne »

Les vestiges archéologiques rencontrés dans les territoires où les Goths séjournèrent durant les premiers siècles de notre ère (plaine germano-polonaise, puis Ukraine à partir du milieu du iie siècle), quand on peut raisonnablement les imputer à cette « nation » germanique, ne permettent pas la mise en évidence d'une culture matérielle gothique originale. Tandis que des importations de produits de luxe romains (vaisselle, bronzes) témoignent de l'aisance de certaines couches de la société gothique, d'autres objets (céramiques, fibules, peignes, etc.) illustrent la participation des Goths à la culture matérielle de la Scandinavie méridionale, également commune à d'autres groupes germaniques.

Le vaste État formé par les Goths à partir du iiie siècle dans le sud de l'Europe orientale, des Carpates au Don, coïncide sensiblement avec l'aire de diffusion d'une culture matérielle homogène, que les archéologues soviétiques ont dénommée « culture de Černjahov » (du nom de la nécropole découverte en 1899 près de Kiev). Cette culture, dont les prolongements sont manifestes jusqu'au ve siècle, ne saurait cependant être tenue pour spécifiquement gothique. En effet, ainsi que les recherches de M. Kazanski l'établissent, la culture de Černjahov fut commune aux Goths, qui en furent l'élément moteur, aux populations autochtones qu'ils dominèrent (Scytho-Sarmates, Géto-Daces, Slaves) et aux divers peuples germaniques qui firent alors partie de la puissante fédération gothique (Vandales, Hérules, Gépides). Cette culture, aux variantes régionales nombreuses du fait de son emprise géographique et de la diversité des peuples qui y participèrent, offrait deux principaux traits unificateurs : de fortes influences provinciales romaines (vaisselle de luxe, équipements guerriers, parures) ainsi que des particularismes indigènes identiques (types d'habitations, coutumes funéraires, céramique commune façonnée à la main, modes vestimentaires, etc.). L'arrivée des Huns en 375, si elle consomma la partition territoriale des Goths, n'eut pas sur le plan culturel les conséquences désastreuses qu'on lui prêtait jadis : ces nomades asiatiques avaient en effet besoin, d'un strict point de vue matériel, des cultures sédentaires qu'ils dominaient. On s'explique ainsi que la culture de Černjahov ait pu perdurer dans les territoires où les Ostrogoths demeurèrent sous le protectorat des Huns.

On a longtemps pensé que le séjour durable des Ostrogoths sur les rives septentrionales de la mer Noire avait été décisif pour l'avenir de leur art, tant était riche le passé artistique de ces régions où les influences grecques puis romaines s'étaient mêlées à des composantes «  barbares » iraniennes, scythes et sarmates. Des études soviétiques (en particulier celles d'A.-K. Ambroz) ont montré en fait que l'installation des Ostrogoths en Crimée, où s'était épanoui le royaume du Bosphore, alla de pair avec la disparition de certaines formes d'art qui s'y étaient développées, comme l' orfèvrerie polychrome (combinant granulations et filigranes avec des pierres en cabochons ou en bâtes, plus rarement cloisonnées). C'est au contraire dans le bassin du Danube inférieur et notamment dans l'ancienne Pannonie romaine (Hongrie actuelle) qu'il convient de rechercher, comme on le propose aujourd'hui, les antécédents les plus directs de l'art italo-ostrogothique. Devenues le centre de gravité de la puissante fédération dominée par les Huns, fédération à laquelle divers peuples germains orientaux participèrent (dont les Ostrogoths), ces régions connurent durant la première moitié du ve siècle l'extraordinaire développement d'un nouveau style polychrome, bien[...]

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Écrit par

  • : directeur du musée des Antiquités nationales, Saint-Germain-en-Laye
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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400 à 500. Royaumes barbares - crédits : Encyclopædia Universalis France

400 à 500. Royaumes barbares

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  • AMALASONTHE ou AMALASWINTHE (498-535)

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    Fille de Théodoric, roi des Ostrogoths, et d'Audoflède, sœur de Clovis. Son père lui fit donner une bonne éducation de type romain et la maria à Eutharic Cilliga, en qui il voyait son successeur. Mais le prince mourut en 522. Amalasonthe fut donc désignée comme régente à la mort de Théodoric (526)...

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