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ŠIK OTA (1919-2004)

Né à Plzeň, Ota Šik est d'abord technicien dans l'industrie électrique. En 1940, il adhère au Parti communiste tchécoslovaque (P.C.T.) et connaît la déportation à Mauthausen, où il restera cinq ans sans cesser de militer. De 1947 à 1952, il étudie à l'Institut d'études politiques et sociales de Prague, où il sera, de 1952 à 1958, assistant puis professeur d'économie politique. Malgré une attitude dure dans la campagne contre les économistes de son ancien parti (social-démocrate), il connaît une disgrâce politique de 1952 à 1958 et perd ses fonctions à la direction du comité régional du P.C.T. à Prague. En 1957 et 1958, il est un des premiers à réclamer que l'on revienne sur l'élimination artificielle des relations monétaires. Une telle pratique avait été inaugurée en Russie après 1917 dans le cadre du communisme de guerre, puis appliquée de nouveau au début de la N.E.P. (Nouvelle Politique économique). Dans la phase d'économie dite de transition où se trouve alors la Tchécoslovaquie, elle permet d'améliorer la question économique en rendant aux prix leur vérité ; elle désorganise en contrepartie la vie économique, tout développement des échanges sous forme de trocs et de transferts de produits supposant un lourd appareil bureaucratique. Malheureusement, le « Système de gestion améliorée » qu'il préconise alors est remis en cause du fait de la nouvelle campagne antiyougoslave. Il n'en demeure pas moins, à partir de 1958, membre du comité central du P.C.T., tout en se cantonnant dans la recherche scientifique. Prorecteur puis, de 1963 à 1968, directeur de l'Institut d'économie rattaché à l'Académie des sciences, il anime la commission pour la réforme économique créée en 1963. Cette année-là, le taux de croissance annuel se transforme en un mouvement de décroissance et donne une baisse de 3 p. 100 du produit national. L'assainissement qu'il opère est bloqué par la prééminence du plan quinquennal et par l'hégémonie des novotnystes au sein du présidium du comité central, lesquels peuvent alors s'appuyer sur leur appareil anonyme et tout-puissant. Ses interventions courageuses en faveur d'une vérité des prix le rendent populaire : en juin 1966, au XIIIe congrès du parti, Novotny ne parvient pas à le faire taire, mais censure son intervention.

Au plénum du comité central de décembre 1967-janvier 1968, il prononce un réquisitoire implacable contre le gaspillage économique, l'absence de démocratie dans le parti et le poids exorbitant de la police sur la politique. Cet homme prudent reconnaît qu'il n'a « plus rien à perdre ». Lors du Printemps de Prague, présent dans tous les milieux, il répond du tac au tac à la démagogie ouvriériste et à l'esprit de censure. Sous la pression des travailleurs, Ota Šik devient le 8 avril 1968 vice-président du Conseil sans se laisser ligoter par le novotnyste Strougal. Il propose alors de joindre la rigueur et la technicité à la liberté d'expression et à la prise en charge de la réforme par les travailleurs eux-mêmes, organisés en conseils. Dès le 27 juin 1968, les conservateurs du présidium réclament son éviction. ; devant la pression soviétique, Dubček s'engage à éliminer Ota Šik lors de la conférence de Bratislava (1er août 1968). Celui-ci, qui ignore tout, part en vacances en Yougoslavie. Au lendemain de l'invasion soviétique, le XIVe congrès clandestin du P.C.T. l'élit au présidium du comité central ; le 3 septembre, il est « démissionné » par le gouvernement Hušak et à la demande des Soviétiques ; quinze jours plus tard, il est nommé conseiller commercial à l'ambassade de Belgrade alors qu'une violente campagne de presse est déclenchée contre lui dans la Pravda et le Neues Deutschland. Il doit se sacrifier[...]

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Écrit par

  • : docteur de troisième cycle, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, diplômé de l'École nationale des langues orientales, chargé de recherche au C.N.R.S., chargé de conférences à l'École pratique des hautes études

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Autres références

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