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BISMARCK OTTO VON (1815-1898)

Le ministre-président de Prusse

Le 22 septembre 1862, Guillaume Ier reçoit Bismarck au château de Babelsberg près de Potsdam. La situation intérieure de la Prusse était grave : en conflit avec le Landtag depuis 1858 sur la question des crédits militaires, le roi ne voyait d'autre issue que d'abdiquer. Bismarck combat cette résolution et s'engage à faire voter les lois sur l'armée : le roi cède, il nomme Bismarck ministre d'État sans portefeuille et ministre-président par intérim. Dès le 30 septembre, les membres de la commission des finances savent à quoi s'en tenir sur les méthodes que compte appliquer le nouveau ministre : « L'Allemagne ne s'intéresse pas au libéralisme de la Prusse, mais à sa force [...]. Ce n'est pas par des discours et des votes à la majorité que les grandes questions de notre époque seront résolues, comme on le croyait en 1848, mais par le fer et par le sang. » Scandale énorme : de nouveau, le roi hésite et se reprend. En gare de Jüterbog, Bismarck lui redonne courage. Le 8 octobre, il est nommé ministre-président à titre permanent et prend aussi le portefeuille des Affaires étrangères.

Bismarck a été appelé pour résoudre la crise intérieure que traverse l'État prussien. Il s'y emploie pendant quatre ans au milieu des pires difficultés, utilise les prorogations et la dissolution (4 sept. 1863), fixe le budget et lève les impôts par décrets, au mépris de la Constitution prussienne de 1850. Mais la machine de l'État ne peut s'arrêter : « Celui qui a la force pour lui va de l'avant. »

Bismarck place toutefois au premier plan le problème extérieur : dès le 4 décembre 1862, il exprime à l'ambassadeur autrichien Karolyi son désir d'améliorer les relations de la Prusse avec son pays. Mais il ne faut pas compter sur des concessions de la part de la Prusse : la place de l'Autriche n'est pas en Allemagne, mais dans l'espace danubien et balkanique. En février 1863, Bismarck fait rejeter par la Diète de Francfort un projet autrichien de réforme de la Confédération germanique. Le conflit n'éclate pas immédiatement ; bien plus, la crise de l'État danois, qui fait suite à la mort de Frédéric VII, est réglée par une collaboration des deux puissances, auxquelles le Danemark abandonne les duchés de Schleswig et de Holstein. Mais cette collaboration ne dure pas ; l'année suivante, la guerre est évitée de justesse grâce à un compromis provisoire, la convention de Gastein (14 août 1865).

Rien cependant n'est réglé : les deux puissances conservent les mêmes objectifs inconciliables. Bismarck, qui, au printemps 1866, opte pour la guerre, se préoccupe de gagner l'opinion allemande, peu favorable dans l'ensemble. Le sort des duchés arrachés au Danemark ne la passionne plus : très habilement, Bismarck fait porter le débat sur la question de la réforme de la Confédération. Le projet qu'il dépose à la Diète comporte l'élection au suffrage universel d'un parlement allemand et donne à la Prusse la parité avec l'Autriche dans la direction de la Confédération. En même temps, sur les conseils de Napoléon III qu'il est allé voir à Biarritz en octobre 1865, Bismarck signe avec l'Italie un traité d'alliance qui obligera l'Autriche à se battre sur deux fronts (8 avr. 1866).

La guerre, qui éclate en juin 1866 entre la Prusse d'une part, l'Autriche et les États allemands de l'autre, est réglée en quelques semaines par la victoire prussienne de Sadowa (3 juill. 1866). Mais, pour Bismarck, celle-ci marque le début d'une des périodes les plus difficiles de sa carrière. Il lui faut d'abord, une fois la question allemande tranchée par les armes, s'opposer à son souverain, Guillaume Ier, qui rêve d'accroissements territoriaux aux dépens[...]

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Écrit par

  • : maître assistant à la faculté des lettres et sciences humaines de Rouen

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Allemagne, 1870-1871 - crédits : Encyclopædia Universalis France

Allemagne, 1870-1871

Le Prince Otto von Bismarck en uniforme, F.S. von Lenbach - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Le Prince Otto von Bismarck en uniforme, F.S. von Lenbach

Bismarck impose ses conditions - crédits : Ullstein Bild/ Ullstein Bild/ Getty Images

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