OUKAZE
Terme désignant à l'origine un ordre du souverain, sans distinction entre les mesures générales et les cas individuels. Avant Pierre le Grand, la formule rituelle : « Le tsar a ordonné et les boyards ont joint leur avis » reconnaissait à l'aristocratie un rôle consultatif en matière législative ; mais, sous le règne du réformateur, les théoriciens de l'absolutisme, comme Théophane Prokopovitch, affirmèrent que l'empereur n'était lié par rien, même pour l'ordre de succession au trône. Seuls les oukazes qualifiés de « personnels » eurent désormais force de loi ; si le Sénat rendait, lui aussi, des oukazes, il le faisait soit par délégation en l'absence du tsar et sous réserve de confirmation, soit en vertu de son pouvoir réglementaire pour préciser les modalités d'application d'une loi.
L'habitude de légiférer par oukazes rendait la tâche des tribunaux difficile ou trop facile, car ces décisions de circonstance se contredisaient souvent, alors que le vieux Code de 1649 était devenu rapidement inapplicable. Dans le courant du xviiie siècle, l'idée d'isoler un corps de lois qui ne seraient pas soumises à une révision perpétuelle gagna du terrain dans la noblesse et reçut une satisfaction partielle avec la création du Conseil d'État (1810), chargé d'élaborer les lois sous forme d'opinions approuvées par le tsar. Mais la codification véritable n'intervint que sous Nicolas Ier. Speranski édita tous les oukazes retrouvés dans les archives, puis il tenta d'en regrouper la substance dans un ordre systématique, après élimination des lois désuètes. La rédaction selon une telle méthode du Code des lois de l'Empire russe (15 volumes, 1833) fait regretter la concision napoléonienne.
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Écrit par
- Jean-Louis VAN REGEMORTER : chargé d'enseignement à l'université de Clermont-Ferrand
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