OUTRE-MER FRANCE D'
Des économies sous perfusion
Le poids de l’import-distribution
La situation économique actuelle est le résultat d’une exploitation coloniale qui a empêché le développement de processus locaux d’entraînement financier, commercial et social. Les élites, d’origine européenne, n’ont fait qu’accentuer la sujétion des colonies à la métropole, car elles n’avaient aucun intérêt à susciter un développement autonome, étant donné que leur prospérité reposait sur la propriété foncière et sur le contrôle, par leurs sociétés commerciales, des produits d’exportation et d’importation. Ainsi, les détenteurs de capitaux ont été peu attirés par les investissements industriels ou touristiques, préférant l’immobilier, le foncier ou le commerce. Alors que l’indépendance de l’île Maurice, acquise en 1968, poussa le nouvel État souverain à sortir de la monoculture sucrière et à diversifier son économie en se tournant vers le tourisme, à La Réunion, le transfert des bénéfices de la terre, spécialement ceux de la canne à sucre, vers le tourisme fut tardif – il intervint dans les années 1980-1990 –, et limité, les secteurs de l’importation et de la distribution étant jugés beaucoup moins risqués et plus rentables. En outre-mer, les hôtels sont donc aujourd’hui moins lucratifs que les grandes surfaces. Il s’agit de sociétés de consommation peu productives et non compétitives. L’agriculture va mal, avec une surface agricole utilisée se contractant sous l’effet de la pression immobilière, un nombre d’exploitations qui continue de diminuer et une population de chefs d’exploitation vieillissante. La canne à sucre est portée à bout de bras par Paris et Bruxelles, par le truchement d’aides étatiques à la production, de quotas et de prix d’achat garantis dans le cadre de l’Organisation communautaire du marché européen du sucre. Le tourisme est presque partout stagnant depuis le début du xxie siècle. Ainsi, la prospérité qui apparaît dans les hypermarchés est largement factice, elle ne repose que sur les transferts colossaux d’argent de l’État et de l’Union européenne sous forme d’aides diverses, de prestations sociales ou de salaires artificiellement élevés.
Des sociétés fortement inégalitaires
Ces derniers sont symptomatiques de la persistance du système colonial. Les agents de la fonction d’État et des collectivités territoriales, plus nombreux par rapport à la population active dans les DROM qu’en France métropolitaine, bénéficient, depuis 1950, d’une majoration de salaires par rapport à la métropole, pour les inciter à vivre dans des contrées lointaines et insalubres. Toutefois, bien que l’incommodité ou l’isolement de l’outre-mer aient considérablement diminué et que ces territoires se soient transformés dans l’esprit de nombre de Métropolitains en paradis tropicaux et en destinations touristiques de rêve, ces « sur-rémunérations » ont eu tendance à se répandre dans de multiples entreprises publiques, dans les banques et l’hôtellerie parfois. Elles sont justifiées par le coût plus élevé de la vie par rapport à la métropole, de 7 % à La Réunion à 39 % en Polynésie française, mais celui-ci n’est pas reconnu pour tout le monde, puisque les bas salaires sont généralement inférieurs à ceux de la métropole. Au début des années 1990, le SMIC dans les DOM était inférieur de près d’un quart au SMIC métropolitain et il a fallu attendre 1996 pour qu’il soit aligné sur celui-ci. Dans les collectivités françaises du Pacifique, il n’y a ni Revenu de solidarité active (RSA), ni même parfois d’allocation chômage.
Les sociétés ultramarines sont plus inégalitaires que la métropole. Les effets socio-économiques sont néfastes : les prix sont tirés vers le haut et la question de la vie chère devient explosive, comme l’ont montré les grèves générales, les blocus[...]
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Écrit par
- Jean-Christophe GAY : agrégé de géographie, professeur des Universités, université Côte d'Azur
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