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LARRAÍN PABLO (1976- )

Les territoires du mal

Tous ces films transportent le spectateur au cœur d’une analyse politique du Chili. Ils élaborent aussi une esthétique narrative de la digression qui s’efforce de montrer les puissances du mal à l’œuvre et la folie qui les domine. Dès Fuga (2006), son premier long-métrage, Pablo Larraín approche les limites de la raison en brossant le portrait d’un compositeur de musique. Tony Manero dépeint à travers Raúl un des personnages les plus détestables qui soient : traître, tueur en série, indifférent à la répression dictatoriale, voleur, couard, obsédé par la célébrité médiatique, macho, il apparaît comme un ange exterminateur solitaire qui échappe au pire des régimes en multipliant les vies parallèles. Cette métaphore du mal trouve sa pleine expression dans ce qui peut être considéré comme le chef-d’œuvre du cinéaste, El Club, grand prix du jury de la Berlinale 2015. Isolée dans une maison sur la côte de La Bocca, une communauté de prêtres catholiques écartés par l’Église à la suite de délits et de sévices inavouables voit arriver un jésuite (Marcelo Alonso) chargé de mener à bien leur examen de conscience. Les langues se délient avec l’irruption dans le village d’une ancienne victime, qui, à travers la violente évocation de son martyr, révèle les duplicités du pouvoir ecclésiastique. Pablo Larraín s’attaque avec un aplomb rare et un sens de l’absurde peu commun à ce qui représente après l’armée une autre grande institution chilienne. En digne héritier de Luis Buñuel.

— Pierre EISENREICH

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Écrit par

  • : critique de cinéma, membre du comité de rédaction de la revue Positif

Classification

Média

<em>Tony Manero</em>, P. Larraín. - crédits : Prodigital/ The Kobal Collection/ Aurimages

Tony Manero, P. Larraín.