- 1. Des pierres de foudre à l’archéologie préhistorique
- 2. Les premiers hommes fossiles
- 3. L’homme antédiluvien
- 4. La découverte de l’homme de Néandertal et de la race de Cro-Magnon
- 5. « Le chaînon manquant » du singe à l’homme
- 6. L’homme de Piltdown et la théorie des présapiens
- 7. Le berceau de l’humanité se promène : de l’Asie vers l’Afrique
- 8. Bibliographie
PALÉOANTHROPOLOGIE ou PALÉONTOLOGIE HUMAINE
Le berceau de l’humanité se promène : de l’Asie vers l’Afrique
Si l'homme de Piltdown fut à l'origine de conceptions erronées qui persistèrent durablement, il n'eut en revanche que peu d'influence sur les différentes hypothèses envisagées quant au « berceau » de l'humanité. L'extraordinaire modernité de son crâne ne faisait en effet que reculer dans le temps l'origine même de l'humanité. Après la Première Guerre mondiale, la majorité des chercheurs considérait encore que l’homme était d’abord apparu en Asie, en dépit de la prédiction de Darwin en faveur de l'Afrique et du fait qu'en 1924 quelque 350 individus fossiles avaient été découverts en Europe occidentale contre un seul en Asie. De nouvelles découvertes effectuées après 1924, à Java, puis celles des Sinanthropes de Chine semblaient d'ailleurs confirmer ce modèle géographique. Dans ce contexte, on comprendra mieux que l'annonce en 1925, par Raymond Dart, de la découverte en Afrique du Sud, à Taung, d'une créature une fois de plus intermédiaire entre les grands singes et l'homme, désignée sous le nom d'Australopithecusafricanus, n'eut pas dans l'immédiat le succès escompté. La découverte de Dart était en quelque sorte prématurée, d'autant que le crâne de Taung appartenait à un très jeune sujet, ce qui ne simplifiait guère son interprétation. En outre, l'enfant de Taung, dont le cerveau était estimé à 520 cm3, ne pouvait rivaliser avec le haut degré de perfectionnement de l' homme de Piltdown. Il fallut attendre près d'un quart de siècle et de nouvelles découvertes d'Australopithèques en Afrique du Sud pour que ceux-ci soient classés comme des hominidés et non comme des singes. L'intérêt pour l'Afrique, si longtemps muette, dès lors ne se démentira plus. La découverte, en 1959, dans la gorge d'Olduvai, en Tanzanie, par les paléontologues Louis et Mary Leakey, du Zinjanthropus boisei, le premier Australopithèque robuste puis des premiers Homo habilis, va déclencher une gigantesque « ruée vers l'os » tout le long des grandes cassures des rifts est-africains.
Les résultats seront à la mesure des moyens mis en œuvre : quelques milliers de restes d'hominidés appartenant à des formes variées et couvrant désormais une longue période de près de cinq millions d'années. Au-delà de la simple accumulation croissante des fossiles, ces recherches en Afrique orientale auront entraîné le développement de nouveaux champs d'investigation : datations absolues, paléomagnétisme, paléoécologie, paléoclimatologie, taphonomie et paléoethnologie. Dans le même temps, les problématiques de la paléoanthropologie se sont largement diversifiées avec la multiplication des découvertes sur tous les autres continents. Si la paléoanthropologie s'appuie toujours sur « de pauvres restes épargnés par le temps », ce qui faisait dire jadis à un Marcellin Boule qu'elle était « arrivée trop tard dans un monde trop vieux », il n'en reste pas moins que notre savoir sur les origines de l'humanité a fait un formidable bond en avant en dépit de toutes les discussions et controverses qui alimentent et alimenteront pour longtemps les débats.
Aussi objectives que puissent être les analyses et les interprétations des documents fossiles, aucun des scénarios proposés n'échappe tout à fait aux idées préconçues ou aux paradigmes dominants. Il est assez significatif que les hominidés, face aux enjeux qu'ils représentent, aient suscité une littérature des plus abondantes où la multiplicité des noms latins ou grecs, invoqués pour toutes les créatures humaines, mythiques ou réelles, réalise comme nous l'avoue Yves Coppens, « un extraordinaire catalogue à la gloire de l'imagination ».
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Écrit par
- Herbert THOMAS : sous-directeur honoraire au Collège de France
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