PALÉODIÉTÉTIQUE ET CUISINE GÉNÉTIQUE
Vers une cuisine génétique ?
Le recours au mot paléolithique pour qualifier une cuisine est une trouvaille médiatique extraordinaire. Aussi bien a-t-on vu pulluler en Californie, puis se répandre ailleurs, des restaurants offrant une cuisine paléolithique, de l'homme des cavernes... On trouve sur la toile des centaines de sites Internet présentant des recettes inspirées du paléolithique. À défaut de recettes préhistoriques avérées comme celles compilées par Jean Bottéro pour présenter la cuisine de la Mésopotamie, les paléodiététiciens ont d'abord eu recours à des recettes éprouvées de la cuisine amérindienne, et, très rapidement, à des recettes simplement dérivées de la cuisine internationale commune : on en exclut les produits lactés, les graisses traitées et les céréales... ce qui rejoint d'ailleurs nombre de régimes de santé qui ne prétendent pas s'inspirer des Néandertaliens. Cela permet d'ailleurs des innovations séduisantes. Ainsi, Thomas Rode Andersen (meilleur chef du monde 2012, étoilé au guide Michelin) a ouvert Palæo à Copenhague le 2 mars 2012, un restaurant de fast-food inspiré des principes de la cuisine paléolithique. Les recettes ne sont pas fournies, mais le Guardian du même jour décrit quelques plats : « En ce qui concerne les hot-dogs, la saucisse enrobée de poireaux sauvages est enveloppée dans une crêpe épaisse à base d'œufs. Le risotto est constitué de petits morceaux de céleri taillés de façon à ressembler à des grains longs de riz. » On ne sait pas si le dernier Néandertalien aurait aimé.
Quoi qu'il en soit, la vogue de la cuisine de l'homme des cavernes ne sera pas pérenne. Au-delà des effets de mode, une autre cuisine fondée sur les propriétés du génome humain, la cuisine génétique, pourrait bien faire son apparition. La comparaison des trente mille gènes de multiples humains fait apparaître de nombreuses différences dans chaque gène, réparties inégalement dans les populations humaines. Au cours des dernières années, une génétique des maladies infectieuses et une génétique de la susceptibilité à de nombreuses maladies se sont développées, visant à la mise au point de traitements individualisés. Pourquoi ne pas faire de même pour l'alimentation ? Peut-on identifier les enzymes qui nous font défaut ou qui fonctionnent trop au contraire ? Cela permettrait d'adapter son comportement alimentaire à la « réalité génétique » de l'individu. Après tout si les enfants atteints de phénylcétonurie survivent, c'est parce qu'ils reçoivent une alimentation pauvre en tyrosine. Pourquoi ne pas tenir compte de son génome avant de commander un menu ? L'idée fait son chemin, mais il faut bien connaître d'abord son ADN avant de commander...
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
Classification
Médias