PALÉOGÈNE
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Le paléogène est la plus ancienne des deux périodes (systèmes) de l'ère cénozoïque. Il s'étend de – 65,5 millions d'années (Ma) à – 23 Ma, soit une durée de 42,5 Ma. Sa limite inférieure, qui est aussi celle qui sépare les ères mésozoïque (ère secondaire des anciens auteurs) et cénozoïque (ères tertiaire et quaternaire des anciens auteurs), coïncide avec la collision d'une météorite avec la Terre. Sa limite supérieure correspond à une inversion du champ magnétique terrestre connue sous le nom de Chron 6Cn.2n.
Ce terme Paléogène, dont l'étymologie signifie « naissance ancienne », a été introduit par Carl Friedrich Naumann en 1866 pour regrouper l'ensemble des terrains sédimentaires compris entre le Crétacé et le Néogène (décrit par Hörnes en 1853). Ces terrains avaient auparavant été dénommés « éocènes » par Lyell (1797-1875) qui, sur la base de fossiles de mollusques marins avait défini quatre périodes géologiques qu'il classait dans l'ère tertiaire : l'Éocène, le Miocène, le Pliocène et le « Upper » Pliocène (qu'il appela Pléistocène).
Dans son acception actuelle, le Paléogène comprend trois époques (séries) qui sont, de la plus ancienne à la plus récente : le Paléocène, comprenant les étages Danien, Sélandien et Thanétien ; l'Éocène, avec l'Yprésien, le Lutétien, le Bartonien et le Priabonien ; et l'Oligocène, avec le Rupélien et le Chattien. Le début de l'Éocène (ou la fin du Paléocène), daté à – 56 Ma est marqué par le dépôt d'une argile marine décarbonatée dont l'analyse de la matière organique qu'elle contient indique un soudain bouleversement du cycle du carbone pendant près de deux cent mille ans. Le début de l'Oligocène (soit la fin de l'Éocène) est moins aisément caractérisé et correspond au niveau d'extinction du genre Hantkenina, foraminifère planctonique.
Durant le Paléogène, les grands traits de l'histoire tectonique, climatique et biologique qui mèneront à l'actuel se mettent en place. Ainsi, la plaque indienne migre rapidement vers le nord durant le Paléocène pour emboutir l'Eurasie. Cette collision conduira, au cours de l'Éocène, à la formation du plateau tibétain et de l'Himalaya. Au début de l'Éocène, l'océan Nord-Atlantique s'ouvre entre le Groenland et la Norvège. Au cours de l'Éocène et de l'Oligocène, la collision entre les plaques africaines et eurasiennes produit la fermeture progressive de la Téthys et la surrection des Alpes. C'est aussi durant le Paléogène qu'une calotte antarctique permanente s'installe et peut-être aussi que des calottes arctiques éphémères apparaissent.
L'aspect le plus marquant du Paléogène est le contraste entre ses trois époques. Après l'extinction en masse de la fin du Crétacé, la biodiversité se rétablit progressivement tant parmi les organismes planctoniques (foraminifères planctoniques et coccolithophoridés) que parmi les vertébrés. L'extinction des dinosaures est suivie de la première grande radiation des mammifères qui sont alors représentés par les multituberculés (mammifères à dentition très particulière). La température des océans augmente progressivement durant le Paléocène, et de façon plus marquée après 58 Ma. Le niveau marin est généralement élevé, surtout à la fin du Paléocène (Thanétien).
Les océans continuent de se réchauffer au cours de l'Éocène inférieur qui est marqué par des épisodes de réchauffement intense que l'on appelle événements hyperthermaux. Le premier d'entre eux s'est produit au tout début de l'Éocène : c'est le Paléocène/Eocène Thermal Maximum [PETM] pendant lequel les eaux profondes océaniques ont atteint des températures de 12 0C, même dans les régions polaires (actuellement de 4 0C). Cela implique une température moyenne de la Terre très élevée et un faible gradient latitudinal de température, ce qui permettait aux animaux d'effectuer des migrations translatitudinales. C'est ainsi que l'on explique la migration apparemment soudaine en Amérique du Nord de mammifères qui auraient évolué en Asie tropicale et équatoriale. Durant le PETM, apparurent dans le Wyoming des mammifères appartenant aux grands ordres modernes. Parmi eux se trouve le premier cheval connu, Hyracotherium, d'une longueur de 60 cm et d'une hauteur de 20 cm. Les ordres des rongeurs, chiroptères (chauve-souris) et primates (ordre auquel l'espèce humaine appartient) apparaissent également à ce moment crucial pour l'évolution des mammifères. Un peu plus tard, au cours de l'Éocène, apparaîtront les artiodactyles, puis les cétacés.
Les températures culminent à l'Éocène inférieur, vers 53 Ma : c'est l'Early Eocene climatic optimum [EECO]. Puis la tendance s'inverse et la Terre se refroidit progressivement durant le reste de l'éocène. Ce refroidissement climatique à long terme entraîne une diminution des aires de distribution des espèces qui tendent à disparaître des latitudes les plus élevées. Ainsi en est-il des coccolithophoridés dont de nombreuses espèces ont disparu des hautes latitudes bien avant de s'éteindre dans les régions tropicales et équatoriales.
L'intensification du refroidissement a conduit à la formation d'une vaste calotte glaciaire sur le continent Antarctique au tout début de l'Oligocène. Les conséquences immédiates ont été l'extinction de nombreuses espèces marines et un changement progressif des paysages terrestres qui devinrent plus arides. Cela produisit, aux latitudes moyennes, un renouvellement des faunes de mammifères, connu sous le nom de « grande coupure ». De plus, les grandes plates-formes épicontinentales carbonatées, bordant le sud de la Téthys, et les mers à sédimentation calcaire, comme dans le bassin de Paris, se résorbèrent. Elles s'étaient développées au cours de l'Éocène lorsque le niveau de la mer était élevé. C'est la fin du dépôt des calcaires à nummulites. Ainsi, comme son nom l'indique, l'Oligocène fut une époque à biodiversité réduite, généralement froide et au cours de laquelle le niveau marin a considérablement fluctué au gré de glaciations successives.
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Écrit par
- Marie-Pierre AUBRY : professeur à Rutgers University, New Brunswick, New Jersey (États-Unis)
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