PALLAVA
L'art Pallava
L'innovation qui consista pour les artistes à cesser d'employer exclusivement le bois et l'argile, matériaux périssables, pour s'essayer à la réalisation d'œuvres en pierre se produisit tardivement dans l'extrême sud de l'Inde : à la fin du vie siècle, voire au début du viie. Le roi Mahendravarman Ier, qui était non seulement un poète (on porte à son crédit une farce en sanskrit demeurée célèbre, le Mattavilāsa) mais aussi un musicien et un peintre, déclare dans une inscription (Maṇḍagapaṭṭu) avoir introduit au Toṇḍaimaṇḍalam un type de monument défiant le temps, « sans briques, sans charpente, sans métal ni mortier ». Il s'agit vraisemblablement de l'architecture rupestre, laquelle a déjà donné en d'autres régions des chefs-d'œuvre (par exemple à Karli et à Ajaṇṭā au Maharaṣṭra, à Bādāmi au Karṇaṭaka).
Une trentaine de grottes ( maṇḍapam) taillées en divers lieux du Toṇḍaimaṇḍalam sont attribuées au règne de Mahendravarman : elles illustrent la première phase du style Pallava. Les grottes, les grands bas-reliefs et les petits sanctuaires monolithes (ratha) de Mahābalipuram en constitueraient la deuxième phase, remontant pour l'essentiel au règne de Narasimhavarman Ier. La troisième phase se caractérise par des temples de pierres taillées et assemblées, conséquence des progrès atteints sous Rājasimha (env. 680-720) dans la technique d'extraction. Au début du viiie siècle se situeraient la construction du Kailāsanātha à Kāñcī, peut-être celle du Tālagirīśvara à Pannamalai et l'achèvement du « temple du Rivage » à Mahābalipuram ; à la fin du siècle auraient été édifiés le Sundararāja-Perumāḷ à Uttaramērūr et le Vaikuṇṭha-Perumāḷ à Kāñcī ; au ixe siècle, enfin, prendraient place le temple de Bāhūr et Vīrattaneśvara à Tiruttani, pour n'en citer que quelques-uns.
La quasi-totalité des temples Pallava subsistant sont brahmaniques, le jaïnisme et le bouddhisme s'étant effacés vers le viiie siècle. La disposition de leurs organes est rigoureusement conformes aux préceptes des āgama, catégorie de textes du rituel dont les milieux sacerdotaux reconnaissent l'autorité. Une enceinte (prakāram) délimite généralement l'aire sacrée à laquelle on accède par un portail (gōpuram) rectangulaire, couvert en berceau. Dans le même axe se situe le sanctuaire (vimānam) carré précédé d'une salle à colonnes (maṇḍapam). Ce schéma destiné à se perpétuer, en s'amplifiant, n'exclut pas la diversité. Ainsi, l'originalité du Kailāsanātha tient à la présence de chapelles extérieures sur le corps du sanctuaire et à des cellules exiguës adossées au mur d'enceinte ; celle du Vaikuṇṭha-Perumāḷ tient aux trois cellas superposées du vimānam, à la galerie hypostyle entourant sa cour, enfin au mur de fond de cette dernière entièrement sculpté (histoire en images de la famille régnante). Dans la décoration de ces temples construits on observe des traits qui resteront propres à l'architecture de l'extrême sud de l'Inde (dravidienne) tout au long de son évolution : leur soubassement compte une série de moulures aux profils variés ; les murs sont scandés en alternance par des niches (destinées à recevoir des statues de dieux) et par des pilastres ; les couvertures, en pierre comme le corps des édifices, prennent l'aspect de pyramides tronquées à gradins – ces gradins étant de faux étages ornés de nombreux édifices miniatures en ronde bosse. Les bâtiments devaient être en outre enrichis de polychromie : le Kailāsanātha conserve des fragments d'un revêtement extérieur de stuc avec des vestiges de peinture.
Si dans les derniers monuments du style on décèle comme un essoufflement des artistes,[...]
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Écrit par
- Rita RÉGNIER : chargée de recherche au CNRS, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet
Classification
Médias
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