PALMYRE
La civilisation palmyrénienne
Vers 129, Hadrien visite Palmyre, alors à l'apogée de sa puissance économique. La ville se transforme : le temple de Baalshamîn est rebâti par Hadrien, le sanctuaire de Bêl est achevé, de nouveaux tombeaux s'élèvent. Mais, surtout, l'urbanisme s'ordonne autour de la reconstruction de l'agora, et de l'édification de la première section de la grande colonnade. À l'ouest, la route de Homs recoupe celle de Damas et pénètre dans la ville par la place ovale et par une voie à colonnade. La grande colonnade, longue de 1 100 mètres, relie ce centre à l'autre pôle de la ville, le temple de Bêl ; entre les deux, la voie s'infléchit au point marqué par l'arc tétrapyle, qui est vraiment le centre de la ville nouvelle. Les portiques de l'agora, vaste cour de 71 mètres sur 84, sont alors ornés de plus de deux cents statues, qui représentent des caravaniers, des militaires et des fonctionnaires. Non loin de là se dresse le théâtre, édifié au milieu du iie siècle et fidèle au modèle romain. Le cadre urbain de Palmyre est donc très proche de celui que les fouilles ont révélé à Gerasa, à Apamée sur l'Oronte, ou de celui que les textes décrivent pour Antioche.
Les sanctuaires élevés à la même époque font beaucoup plus appel au fonds indigène et à l'influence mésopotamienne. La divinité la plus importante, Bêl, qui a emprunté son nom au grand dieu de Babylone, est en fait une divinité autochtone, Bôl, qu'il faut rapprocher des Baal phéniciens. En tout cas, Bêl est adoré dès le iiie siècle avant J.-C. ; il sera assimilé à Zeus. Un relief de son temple le montre en lutte avec l'anguipède, devant Héraclès, les dieux phéniciens Shadrapa, Atargatis et Ichthys, et une divinité palmyrénienne : on voit donc que Bêl fait partie d'un panthéon composite, où l'influence syrienne est nette.
Il est souvent associé à Aglibôl, dieu taureau et dieu lunaire à la fois, et à Yarhibôl, dieu solaire qui est aussi le protecteur des sources. Les statues de la triade ou les bétyles qui en tenaient lieu étaient conservés dans le temple. Celui-ci est très original : ses grandes lignes sont celles du temple gréco-romain, rectangulaire, avec une colonnade entourant une cella ; mais l'accès à celle-ci se fait par une porte placée dissymétriquement sur un des longs côtés, tandis que, à l'intérieur de la cella, les deux petits côtés sont occupés par des tabernacles ou thalamoi, structures faites de colonnes et de niches plaquées comme un décor contre le mur ; des escaliers placés aux quatre angles conduisaient à une terrasse ornée de merlons. Le déroulement des processions exigeait un parvis tout autour du temple. Cette enceinte de 205 mètres sur 210 est limitée par un mur orné de portiques ; outre le temple, elle renfermait, comme les autres sanctuaires sémitiques, un autel et un bassin sacré. Le temple fut commencé en 32, et les portiques élevés entre 80 et 120.
Après Bêl, Baalshamîn est le deuxième dieu de la ville : ce « maître des dieux » est identique à Hadad dont le culte est commun à toute la Syrie. Qualifié de « grand et miséricordieux », il exerce les mêmes fonctions de dieu cosmique que Bêl. Son temple, achevé en 130, comporte une façade à six colonnes, mais entre les pilastres des faces latérales s'ouvrent des fenêtres étrangères à l'architecture gréco-romaine ; on a restauré le thalamosqui occupe tout le fond de la cella.
En l'absence de textes, des tessères nous renseignent sur les banquets rituels et les distributions alimentaires faites par les collèges sacerdotaux : le symposiarque des prêtres de Bêl tenait le plus haut rang dans la cité.
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Écrit par
- André LARONDE : membre de l'Institut, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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