PĀṆINI (Ve s. av. J.-C. env.)
L'aspect formel de la description
Du point de vue formel, l'on peut définir l'Aṣṭādhyāyī comme un formulaire algébrique, qui vise à fournir un texte facile à mémoriser, donc un mode d'expression très court, et permet de disposer de règles pour former les mots de l'usage, donc une formalisation rigoureuse. Cette dernière est très poussée et l'on a, dans cette grammaire, le plus ancien exemple de métalangue et l'un des plus riches.
Le vocabulaire grammatical est formé d'abord de mots déjà existants, dont on définit une nouvelle acception en grammaire. Ensuite des mots entièrement artificiels sont créés : par exemple, la base placée devant un suffixe à initiale vocalique ou y est appelée « bha », etc. Il y a de nombreuses abréviations. Un jeu de lettres symboliques permet de montrer les propriétés de formes citées : par exemple, le suffixe d'adjectif verbal ta est appelé « kta » avec un k symbolique indiquant que, devant ce suffixe, la racine est au degré zéro. Une forme théorique unique est donnée à un groupe d'éléments qui forment une classe : l représente toutes les désinences du verbe ; suivi d'une voyelle, la, li, etc., l indique le temps, présent, parfait, etc. Suivi encore de ṭ ou ṅ, l indique l'emploi de telle ou telle série de désinences : laṭ est ainsi le représentant des désinences primaires du présent actif, ti, tas etc. Pāṇini détourne même quelques désinences nominales de leur usage courant : la désinence d'ablatif signifie « après telle forme, telle opération a lieu » ; celle de locatif signifie « devant telle forme », etc. Il admet dans les sūtra la possibilité de sous-entendre beaucoup plus de termes qu'il n'est possible dans l'usage courant. Les termes sous-entendus sont ceux qui peuvent être impliqués par le sens, le contexte, ou qui sont par convention reconduits de formules antérieures. L'ordre des règles a donc une signification, d'autant plus que leur place dans le traité détermine aussi, selon des conventions définies, l'ordre de leur application dans la construction des mots.
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Écrit par
- Pierre-Sylvain FILLIOZAT : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
Classification
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