PAPAUTÉ
Doctrine et droit catholiques romains
Doctrine
Comme successeur de l'apôtre Pierre, l'évêque de Rome est le chef du collège apostolique et le chef visible de l'Église catholique. La question de savoir si cette qualité est nécessairement liée au siège de la ville de Rome en tant que lieu géographique est une question ouverte et librement discutée. Il en est de même pour celle de savoir si le titre de chef de l'Église est identique ou non à celui de chef du collège des évêques, étant admis cependant que cette qualité vient du Christ. Évidemment liée à la condition terrestre et militante de l'Église, elle n'est pas absolue : qu'il s'agisse du magistère ou de la juridiction, elle est limitée et conditionnée par le droit divin (foi, sacrements, structure essentielle du ministère), par le droit naturel et par ce qu'on appelait le generalis status Ecclesiae, le bien commun, la paix, l'ordre, la santé de l'Église, selon sa Tradition. Cela marque la limite du pouvoir papal de dispense. On peut noter, avec les papes eux-mêmes (tels Pie IX, le 20 juill. 1871 ; Pie XII), que certaines interventions et décisions des papes qui se sont produites dans l'histoire relevaient non de la substance de leur autorité apostolique, mais de ce qu'y ajoutait le droit public de l'époque : ainsi, déposer des souverains. Mais même l'exercice du pouvoir proprement papal a connu des modalités diverses selon les temps et les lieux : il ne lui est essentiel, par exemple, ni de convoquer les conciles (bien que cela relève de la primauté ; mais les premiers conciles œcuméniques ont été convoqués par l'empereur), ni de nommer ou de confirmer les évêques, ni évidemment d'avoir son siège en un territoire souverain propre, ou d'entretenir une représentation diplomatique.
Toute mission comporte une tâche donnée, avec les facultés nécessaires pour l'accomplir : ainsi le service pastoral suprême comporte certains « pouvoirs » ou compétences que l'on peut distinguer en « juridiction » et « magistère ».
Le pape a une juridiction épiscopale, c'est-à-dire pastorale, sur tous les baptisés, juridiction ordinaire, c'est-à-dire découlant de sa charge même et immédiate : non en ce sens qu'il serait l'évêque de Cologne ou de Madrid, mais en ce sens que, pour décider quelque chose intéressant Madrid ou Cologne, il n'a besoin d'aucune permission, d'aucun intermédiaire (d'aucun placet royal ni épiscopal). Cette juridiction est pouvoir de légiférer, de gouverner, de dispenser : ainsi la papauté moderne se reconnaît le droit de dissoudre les liens même de droit naturel lorsqu'ils ont été établis par l'intervention d'une volonté humaine, tels qu'un mariage entre deux non-baptisés, ou un vœu solennel de religion. Certains jugements et la levée de certaines excommunications sont réservés au pape (Codex iuris canonici, canons 1557, 894, 2320, 2343, 2369 de l'édition de 1917 ; canons 1405, 1367, 1370, 1388 de l'édition de 1983).
Le magistère est la faculté d'enseigner avec une autorité qui ne se réduit pas à celle des raisons de science apportées. On distingue le magistère ordinaire (lettres, discours, encycliques dont la série commence avec Mirari vos, 1832), par lequel le pape oriente l'enseignement de toute l'Église et cherche à en assurer l'unité, et le magistère extraordinaire, c'est-à-dire le jugement solennel et définitif par lequel un concile, ou le pape personnellement, définit un article devant être tenu par tous. C'est à ce sujet que, depuis le xive siècle, on parlait d'infaillibilité, point qu'a défini le Ier concile du Vatican. Cela ne signifie pas que le pape soit habituellement infaillible. Comme docteur privé, il peut être hérétique et même enseigner[...]
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Écrit par
- Yves CONGAR : professeur à l'Institut catholique de Paris
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