PAPILLOMAVIRUS
La dénomination de ces virus rappelle leur rôle dans la papillomatose, c'est-à-dire la formation de verrues. Peyton Rous et Joseph Beard ont montré en 1935 que ce type de virus détermine chez le lapin des verrues, qui peuvent se cancériser.
De nombreux virus de la même famille ont été découverts depuis lors, chez diverses espèces animales (bovins, cervidés, chiens, singes...) et chez l'homme. On connaît actuellement près d'une centaine de papillomavirus humains, responsables d'une grande variété de tumeurs, le plus souvent bénignes, au niveau de la peau et des muqueuses, allant de la simple verrue cutanée, au carcinome épidermoïde du col utérin.
Troisième cause de cancer aux États-Unis, deuxième cause de mortalité féminine par cancer dans le monde, le cancer du col utérin constitue un réel problème de santé publique, en particulier dans les pays en développement. Pourtant ce cancer peut guérir lorsqu'il est traité tôt. Son dépistage par frottis cervico-vaginal est efficace, mais s'avère insuffisant pour détecter certaines lésions de bas grade ou des atypies cellulaires à haut risque d'évolution cancéreuse. L'association au frottis classique d'une recherche de papillomavirus oncogène par des méthodes de biologie moléculaire améliore la sensibilité du dépistage, et permet l'instauration plus précoce d'un traitement curatif. Les essais actuels de vaccination contre les papillomavirus oncogènes représentent un espoir fondé de limiter ce cancer viro-induit.
Structure des papillomavirus et modalités de l'infection virale
Ces petits virus (55 nm) à ADN sont les seuls représentants de la famille des Papillomaviridae. Leur génome est un ADN double brin circulaire d'environ 8 000 paires de bases, enroulé sur lui-même et protégé par une capside protéique de symétrie icosaédrique (72 capsomères) non enveloppée (fig. 1). Le virus est très résistant aux modifications de pH et de température, ce qui favorise sa persistance dans le milieu extérieur. Le génome viral code huit protéines, dont E1, E2, E4, E5, E6 et E7 qui sont impliquées dans la multiplication du virus, et L1 et L2 qui sont les constituants de la capside. La protéine L1, à fort potentiel immunogène, est utilisée dans le développement des vaccins. E6 et E7 sont les principales protéines impliquées dans la cancérogenèse.
À la faveur d'un microtraumatisme, générant une brèche dans l'épithélium cutané ou muqueux, le virus va pénétrer dans l'organisme puis se multiplier dans les cellules basales de l'épithélium. Au niveau du col utérin, la cible préférentielle du virus est la zone de jonction entre épithélium malpighien et épithélium glandulaire située à l'orifice du col. Cette région est particulièrement sensible à l'infection chez les femmes jeunes car les cellules s'y répliquent activement. Dans les cellules basales de l'épithélium du col, le virus peut soit se multiplier, soit persister sous forme épisomale, ou s'intégrer au génome cellulaire. La multiplication virale suit la différenciation des cellules de l'épithélium au cours de leur ascension vers la surface : seules les cellules des couches superficielles, très différenciées, contiennent des virions complets. La desquamation et la lyse de ces cellules vont permettre la diffusion du virus. Les cellules sont modifiées par la présence du virus, avec un noyau de grande taille et une vacuole contenant les particules virales. Cet effet cytopathique est appelé koïlocytose. Il est caractéristique de l'infection à papillomavirus.
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Écrit par
- Sophie ALAIN : professeure des Universités, praticienne hospitalier
- François DENIS : docteur en médecine, docteur d'État ès sciences, professeur des Universités en bactériologie, virologie, hygiène
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