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PARTIS POLITIQUES Fonctionnement

Division et spécialisation du travail

Un parti est aussi le lieu, comme toute organisation, d'une division et d'une spécialisation du travail. Par-delà les règles formelles statutaires, voire légales qui définissent l'étagement, le découpage et le nom des structures (cellule, union de circonscription, section, fédération, parti national), des organes qui les dirigent ou les contrôlent (bureau politique, secrétariat, comité directeur, comité exécutif, conseil national, congrès, commission de discipline, conseil de gouvernance), des titres des dirigeants (secrétaire général, président) et des missions qui leur sont confiées, la sociologie des partis prend en compte le droit interne pour ce qu'il est : une ressource (faire voter, démissionner, convoquer un congrès...) et une contrainte (respecter les formes) qui font aussi partie de la compétition à l'intérieur du parti.

Oligarchies partisanes

La thématique de l'oligarchie comme forme ordinaire de la coopération/compétition intra-partisane remonte à l'ouvrage fondateur de Roberto Michels, Les Partis politiques, publié en 1911, qui, à partir de l'exemple de la sociale-démocratie allemande, entendit établir qu'aucun parti ne pouvait prétendre être une démocratie : « L'organisation est la source d'où naît la domination des élus sur les électeurs, des mandataires sur les mandants, des délégués sur ceux qui les délèguent. Qui dit organisation dit tendance à l'oligarchie. » Un parti fondé pour défendre une cause et poursuivre un objectif politique tend à devenir une fin en soi fonctionnant au profit de l'oligarchie qui s'en est approprié la direction. La perpétuation de l'organisation pour elle-même devient plus importante que la recherche des buts visés. En effet, les études statistiques montrent que plus on monte dans les hiérarchies partisanes (sauf politique volontariste de quotas), plus la sélection des dirigeants aboutit à la minoration de certaines catégories (femmes, jeunes, classes populaires, faiblement diplômés, nationaux d'origine étrangère).

Toutefois, deux points restent aveugles dans l'approche michelsienne. Toutes les oligarchies ne sont pas semblables et la démocratie comme idéal égalitaire n'équivaut pas à la démocratie comme technologie politique. Le propos n'est pas généralisable puisque les configurations partisanes peuvent différer dans leurs modes de gouvernement selon que l'oligarchie repose sur une bureaucratie de permanents (comme les partis communistes des années 1940-1970), sur une bureaucratie centralisée et mutualisée au service d'une équipe dirigeante, sur des coalitions d'élus regroupés ou non en tendances, privatisant à leur profit les ressources partisanes voire sur une monocratie.

Comment définir la démocratie partisane ? En considérant que tout le monde veut et peut participer, on propose une définition qui est contradictoire avec la réalité de l'inégalité de distribution des ressources politiques. Joseph Schumpeter propose une définition plus exigeante des démocraties partisanes : est démocratique un parti dans lequel les élites en compétition sont départagées à l'issue d'une libre concurrence. Dans un air du temps antipolitique marqué par la désaffiliation et le dénigrement de la médiation partisane, les responsables de partis ont tenté de renforcer leur légitimité en multipliant les signes parfois contradictoires de bonne volonté à l'égard d'une certaine démocratie (élection des dirigeants, voire du dirigeant par les adhérents, choix des candidats par les adhérents, reconnaissance des courants, célébration du militant ou des électeurs dans des élections primaires, référendums internes, communication horizontale par le biais d'Internet, accès plus facile aux dirigeants notamment par les blogs...).[...]

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Écrit par

  • : professeur de sciences politique, université de Paris-I, Centre de recherches politiques de la Sorbonne, Laboratoire de sciences sociales de l'École normale supérieure

Classification

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