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PARTIS POLITIQUES Théorie

Le parti comme entité

Dans cette conception, le parti est considéré comme un acteur collectif agissant par ses porte-parole, comme dans ces raccourcis : « l'U.M.P. dit que ». En fonction des théories mobilisées, on y cherche des familles, des clivages des fonctions, des institutions ou des stratèges.

Les familles politiques

Les partis sont d'abord considérés, par Edmund Burke ou par Benjamin Constant, comme regroupant des hommes qui « professent la même doctrine politique ». La recherche des filiations par le recours aux cultures ou aux familles politiques permettrait de définir, par-delà les frontières nationales, des types de partis saisis par leurs programmes et idéologies : conservateurs, libéraux, agrariens, démocrates-chrétiens, sociaux-démocrates et socialistes, communistes ; mais aussi populistes, fascistes et écologistes. Pourtant, une même famille peut occuper des positions différentes dans des configurations nationales et partisanes diverses.

L'identité revendiquée du parti (chrétien, révolutionnaire, corse, républicain...) est un point de repère efficace pour ceux qui maîtrisent a minima le vocabulaire politique, mais insuffisant. Cette identité est toujours l'objet de luttes d'identification et de catégorisation multiples. En Turquie par exemple, les débats portent sur la « vraie nature » de l'A.K.-P ; est-il islamiste, islamique, néo-conservateur, démocrate-musulman ? Le B.J.P. indien est-il hindouiste ou ethno-nationaliste ? Les partis-familles, quels que soient les liens transnationaux qu'ils nouent (par exemple les partis communistes des années 1920-1960), ne sauraient être compris sans analyser les contraintes du champ politique national dans lequel ils sont parties prenantes. Non seulement ils choisissent leurs alliés, leurs adversaires et leurs ennemis, mais ils inventent aussi des types d'organisation et d'enracinements spécifiques.

Les clivages

L'approche « clivagiste », développée en Europe, va au-delà des précédentes. Désireux de fournir une cartographie partisane stylisée et lisible, Seymour Martin Lipset et Stein Rokkan ont raffiné l'approche socio-militante de Marx et d'Engels qui, en 1895, ramenaient les « conflits politiques à des luttes d'intérêts entre les classes sociales et les fractions de classes existantes ». Chez Lipset et Rokkan, prolongés par Daniel-Louis Seiler, la société européenne a été le siège de deux grandes révolutions, nationale et industrielle, qui ont produit quatre grands clivages : Église/État, centre/périphérie, possédants/travailleurs, urbain/rural. Les partis sont l'expression stabilisée et institutionnalisée de ces clivages. Et ceux de la fin des années 1960 seraient la congélation de l'état des rapports de force sociaux des années 1920. Ces thèses ont suscité de multiples débats, souvent tapageusement classificatoires, parfois orientés vers la production d'indicateurs statistiques permettant de montrer la force du clivage, comme ceux élaborés par Kenneth Janda en 1980.

Plus récemment, Lauri Karvonen et Stein Kuhnle ont proposé une relecture contemporaine de la thèse de la « congélation » et aussi de l'hypothèse d'une « décongélation », valables pour le continent européen. La marginalisation du vote de classe ou du vote religieux, les populismes, l'écologisme et le fédéralisme européen seraient au principe des nouvelles lignes de fracture. Dans cette hypothèse, la congélation peut désigner un même parti et son clivage, un même parti mais avec un clivage évolutif, un même clivage mais avec un parti différent (un parti gardant au travers de son sigle une identité pérenne mais qui ne cesse de changer), ou un même assemblage partisan.

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Écrit par

  • : professeur de sciences politique, université de Paris-I, Centre de recherches politiques de la Sorbonne, Laboratoire de sciences sociales de l'École normale supérieure

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