PIA PASCAL (1903-1979)
Poète et journaliste, Pascal Pia fut un des plus étonnants érudits littéraires du xxe siècle. De son véritable nom Pierre Pascal Durand, il naît à Paris le 15 août 1903, de parents cévenols.
Son père, Arthur Durand, meurt pour la France le 26 septembre 1915, tué à Somain. Sa mère ne peut continuer à payer ses études.
Révolté contre tout et tous, il se sauve de chez elle et va vivre d'abord chez un oncle dans le Midi, puis exerce divers métiers pour subsister. D'une précocité stupéfiante, il collabore dès l'âge de quinze ans à la feuille anarchiste, L'En Dehors, puis, en 1919, au stirnérien L'Un. Il est ardemment antimilitariste, alors que les autres rédacteurs ne sont que pacifistes. C'est là qu'il rencontre Marcel Sauvage, grand blessé de guerre, qui va fonder en 1920 avec Florent Fels la revue Action, où il publie ses premiers poèmes et connaît Max Jacob, André Salmon et les très jeunes écrivains de son âge : André Malraux, Marcel Arland, Georges Gabory, Jean Dubuffet. Au même moment, il rencontre Jean Cocteau, qui aura sur lui une réelle influence, et le poète symboliste Édouard Dujardin, fondateur de La Revue wagnérienne, ardent partisan de l'entente avec l'Allemagne, qui publie dans ses Cahiers idéalistes une de ses premières proses.
Pour vivre, il est correcteur d'imprimerie et travaille chez un agent de change. Il est alors passionné de boxe, de music-hall et de chansons, et c'est à Montmartre qu'il rencontre le poète et romancier néerlandais Charles-Edgar du Perron, qu'il présente à André Malraux et qui dépeindra leur petit groupe dans son roman Le Pays d'origine. À la Bibliothèque nationale, Pia recherche des érotiques qui seront réédités d'abord par un commerçant en grivoiserie, Jean Fort, puis par un libraire lettré, René Bonnel. C'est à la Bibliothèque nationale aussi qu'il rencontre l'érudit Frédéric Lachèvre qui lui présente les poètes Fernand Fleuret et Louis Perceau, amis d'Apollinaire et auteurs avec celui-ci d'un livre sur L'Enfer de la Bibliothèque nationale. Devenu collaborateur de Lachèvre, Pascal Pia prépare pour lui de nombreux textes et devient le nègre d'universitaires plus ou moins éminents. Il écrira ainsi onze thèses de doctorat.
Avec René Bonnel, soit ouvertement aux éditions de la Grenade, soit sous le manteau, il se livre à des mystifications : Les Années de Bruxelles, fragments « inédits » des journaux intimes de Baudelaire, et à des éditions d'ouvrages galants, dont nous ne retiendrons que ceux qu'a consacrés l'histoire littéraire : Les Onze Mille Verges d'Apollinaire, Le Con d'Irène de Louis Aragon, Mademoiselle de Mustelle de Mac Orlan, revêtu de la couverture de la Bibliothèque rose, ce qui déclenche une gigantesque opération policière chez les libraires de Paris. Avec André Malraux, l'échange est quotidien ; ils se retrouvent régulièrement au café de l'Univers, place du Théâtre-Français, avec Du Perron, Louis Chevasson et Francis Ponge.
En 1923, Pascal Pia fait son service militaire dans les zouaves en Algérie. Il écrit un roman antimilitariste, Les Barrières, que Gaston Gallimard accepte de publier, ainsi qu'un court recueil de poèmes, Le Bouquet d'orties. À son retour, en 1924, il est chef de fabrication chez Albin Michel ; persuadé que tout est voué au néant, il détruit ses deux manuscrits, à la stupéfaction de Rivière et de Gallimard. Ne seront sauvés du désastre que les poèmes parus dans la N.R.F. et le Complément au Bouquet d'orties, suite de poèmes érotiques que Charles-Edgar du Perron édite à ses frais en 1924, à vingt-cinq exemplaires. En 1927, Pascal Pia se marie et, à partir de ce moment, poursuit une carrière journalistique plus régulière, en continuant son travail d'éditeur. Il devient secrétaire de[...]
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Écrit par
- Jean-José MARCHAND : écrivain
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