LA TOUR DU PIN PATRICE DE (1911-1975)
Peu de vies sont aussi discrètes que celle de Patrice de La Tour du Pin, qui se confond presque totalement avec son œuvre. On sait peu de chose de ce poète, sinon qu'il est né à Paris d'une ancienne famille du Dauphiné alliée aux descendants des rois d'Irlande. Sa mère était fille d'un général irlandais, petite-fille de Condorcet. Ses origines celtes expliquent sans doute chez ce poète ce mysticisme lyrique qui n'est pas sans évoquer celui de Vigny, une mythologie portée vers les brumes et les rêves peuplés d'étranges figures, oiseaux et êtres.
Son enfance se passe dans les forêts et les landes du Gâtinais. Il fait des études de lettres au collège Sainte-Croix de Neuilly et au lycée Janson-de-Sailly, puis il suit les cours de l'École libre des sciences politiques, où il sera le condisciple de Maurice Schumann, un des fondateurs du M.R.P. La publication dans la Nouvelle Revue française en 1931, c'est-à-dire tout de suite après l'aventure surréaliste, d'un long poème de facture classique et d'inspiration symboliste. Les Enfants de septembre, qui apparaît comme une rupture, le rend immédiatement célèbre. Il a vingt ans. Son premier recueil publié, La Quête de joie (1933), confirme la gloire naissante de ce poète secret, exigeant, rigoureux, qui, dès 1935, vit à l'écart du tumulte littéraire, dans son château, où il écrira L'Enfer, puis en 1936 Le Lucernaire et, en 1938, Psaumes et La Vie recluse en poésie. Il ne sera tiré de sa retraite que par la guerre, au cours de laquelle il sera blessé à la tête le 16 octobre 1939, puis fait prisonnier. Libéré en 1943, il va retrouver sa quiétude campagnarde, en compagnie de sa femme, de ses filles... et de son œuvre. Le siècle n'a pas de prise sur lui. Le temps, la guerre, les révolutions n'influencent en rien son inspiration essentiellement tournée vers un tourment intérieur. C'est dans le cadre immuable de cette solitude austère que le poète va édifier son œuvre la plus importante, Une somme de poésie, qui comporte trois moments : Le Jeu du seul (1946), Le Second Jeu (1959), Petit Théâtre crépusculaire (1963).
En 1961, il reçoit le grand prix de poésie de l'Académie française et, en 1971, le grand prix de littérature catholique pour son recueil Une lutte pour la vie.
Au lendemain du deuxième concile du Vatican, il fait partie de la commission de cinq membres choisis par l'épiscopat pour traduire en français les textes liturgiques. Il est le seul laïc autorité à participer à cette tâche monumentale. Interrogé sur les motifs de ce choix, il répond avec sa modestie coutumière : « Je suis écrivain, catholique, et surtout, j'ai beaucoup de temps libre. »
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Écrit par
- Paul MORELLE : critique littéraire
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