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PATRIMOINE INDUSTRIEL EN ITALIE

Les modalités de l'action culturelle

Le sauvetage et l'étude du patrimoine industriel en Italie s'organisent dans des conditions sensiblement différentes de celles que nous connaissons en France, avec laquelle la comparaison s'impose puisque c'est pratiquement à la même période – la fin des années 1970 – que l'intérêt a pris corps dans les deux pays pour ce nouveau champ scientifique et culturel. L'intervention de l'administration centrale est sensiblement plus faible en Italie ; rien qui puisse être rapproché, par exemple, de la prospection systématique menée par l'Inventaire général des richesses et monuments artistiques de la France menée au sein de la Direction du patrimoine, au ministère parisien de la Culture. Beaucoup plus faible aussi en Italie, l'action du mouvement associatif qui, du côté français, a joué un rôle si utile sur le terrain, au contact direct avec les populations. En revanche, les initiatives individuelles au sein des universités italiennes et autres institutions d'enseignement supérieur ont multiplié les foyers de réflexion et de travail ; les approches les plus importantes ont été celles des départements d'histoire de l'architecture ou des historiens des sciences et des techniques, moins souvent de l'économie et de la société. Dans les deux pays, l'importance du rôle culturel des administrations régionales est essentielle ; mais, sans doute plus qu'en France, tous les autres échelons sont également présents, coopérant dans des « montages » complexes et efficaces : provinces (l'équivalent de nos départements), communes jusqu'aux plus modestes, dans des synergies qui s'établissent avec les sphères des affaires et de la recherche. C'est de cette manière, par exemple, que progressent depuis des années la connaissance et la mise en valeur du riche patrimoine minier de la Toscane, celui aussi de sa métallurgie et de sa géothermie, de Piombino à Follonica, de Massa Marittima à Larderello.

Une autre divergence frappante par rapport à la France s'observe au niveau des moyens d'édition mis en œuvre pour diffuser cette nouvelle culture du patrimoine industriel. Le Touring Club italien a de bonne heure publié un guide des sites historiques de l'industrie italienne, associés à l'histoire des paysages ruraux (vol. I, Campagna e Industria ; vol. II, Itinerari). En 1983, les pères fondateurs de la Société italienne d'archéologie industrielle ont lancé une belle revue, Archeologia industriale, aussi substantielle par ses textes scientifiques qu'attrayante par son iconographie documentaire ; elle n'a malheureusement vécu que quelques numéros, n'ayant pu réussir à asseoir sa vocation d'unification à la fois nationale et épistémologique : les tiraillements étaient trop forts entre les partisans d'une approche privilégiant le bâti et l'architecture et ceux d'une étroite subordination de l'archéologie industrielle à une histoire plus globale et plus conceptuelle, celle de l'urbanisation ou celle des techniques et de l'organisation du travail.

En 1987 a vu le jour un nouveau périodique (sous le titre aussi énigmatique qu'alléchant de Il Coltelló di Delfo, emprunté à un passage de La Politique d'Aristote), qui a été supprimé en 1998 après une trentaine de numéros. Son fondateur Bruno Corti insistait sur la nécessité absolue d'intéresser les dirigeants des entreprises publiques et privées, détentrices non seulement de vestiges, mais aussi de tout ce qui par la marche inéluctable de l'obsolescence deviendra demain objet à son tour de mémoire et d'étude. La médiatisation du patrimoine industriel progresse, de toute façon, grâce à l'instrument classique, mais employé en toute occasion par les Italiens, de l'exposition – [...]

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Écrit par

  • : directeur d'études honoraire à l'École des hautes études en sciences sociales

Classification

Médias

Circuit automobile de l'usine Fiat Lingotto, Turin - crédits : Fox Photos/ Hulton Archive/ Getty Images

Circuit automobile de l'usine Fiat Lingotto, Turin

Usine Fiat de Turin, 1919 - crédits : Fox Photos/ Getty Images

Usine Fiat de Turin, 1919