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DURAND-RUEL PAUL (1831-1922)

L’exposition Paul Durand-Ruel, le pari de l’impressionnisme, qui s’est tenue au musée du Luxembourg à Paris (9 octobre 2014 - 8 février 2015), a permis de retracer le parcours de ce marchand d’art. L’intimité de son salon est évoquée par un dessin en grisaille où prennent place une double-porte fleurie peinte par Claude Monet et la sculpture Jeune mère à la grotte (1893) d’Auguste Rodin. Aux murs sont accrochés les portraits qu’Auguste Renoir a faits de Paul Durand-Ruel et de ses cinq enfants (devenu veuf à quarante ans, en 1871, il les a élevés seul et les a impliqués dans ses affaires). De fait, Paul Durand-Ruel ouvrait volontiers son appartement de la rue de Rome où se trouvait sa collection personnelle d’œuvres impressionnistes. Il suffisait en principe de prévenir la veille mais, à la fin du siècle, le succès était tel qu’il fallut restreindre les visites.

De Delacroix à Monet

Né en 1831 à Paris, Paul Durand-Ruel a appris son métier auprès de son père qui, tenant à l’origine un magasin de papeterie, y avait ajouté des fournitures pour artistes puis s’était mis à louer des tableaux et à en vendre. Mais, dans ses Mémoires (publiées post mortem en 1939), il donne un tour plus romanesque à son histoire. C’est à l’Exposition universelle de 1855, ébloui par les trente-cinq Delacroix exposés, qu’il aurait découvert sa vocation de promouvoir les artistes vivants. Il soutient d’abord ce qu’il appelle « la belle école de 1830 » : Delacroix, mais aussi Corot, Théodore Rousseau (Vue du mont Blanc, 1865), Millet, Courbet. Convaincu par le génie de Delacroix, il achète entre 1868 et 1883 plus de cent soixante de ses œuvres, dont La Mort de Sardanapale (1827-1828), enlevée pour 96 000 francs lors d’une vente aux enchères. Pousser les prix de ses artistes en vente publique fait partie de sa stratégie. En 1865, il prend la direction de la galerie et l’installe rue Laffitte, au cœur du marché de l’art parisien. L’exposition du musée du Luxembourg met en lumière l’aspect découvreur et aventurier du marchand mais fait l’impasse sur son réalisme économique. S’il est vrai qu’il a plusieurs fois frôlé la faillite à cause de son engagement auprès des impressionnistes, il n’a par ailleurs jamais cessé de vendre Bouguereau et Cabanel pour maintenir l’équilibre financier de sa galerie.

Paul Durand-Ruel, A. Renoir - crédits : Archives Durand-Ruel/ Durand-Ruel & Cie

Paul Durand-Ruel, A. Renoir

Après la déclaration de guerre franco-prussienne en juillet 1870, Paul Durand-Ruel va s’installer à Londres où il a beaucoup de relations d’affaires. C’est là qu’il rencontre, parmi les réfugiés français, Monet et Pissarro. Séduit par leur peinture claire, souvent de plein air, il leur achète des tableaux et les expose avec d’autres artistes français dans la German Gallery, à Mayfair – il conservera cet espace londonien jusqu’en 1875. À son retour à Paris, il acquiert ses premiers Degas, Renoir, Sisley ; et fait un coup d’éclat avec Manet : il emporte d’abord deux paysages de lui déposés chez Alfred Stevens, puis le lendemain, à son atelier, achète vingt et une toiles en une seule fois. S’assurer le monopole d’une production artistique est l’une de ses méthodes commerciales.

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Écrit par

  • : agrégée de lettres, docteure ès lettres, chercheuse à l'École des hautes études en sciences sociales

Classification

Média

Paul Durand-Ruel, A. Renoir - crédits : Archives Durand-Ruel/ Durand-Ruel & Cie

Paul Durand-Ruel, A. Renoir

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