FORT PAUL (1872-1960)
Fils d'un minotier champenois qui s'installe à Paris en 1878, Paul Fort fait ses études secondaires au lycée Louis-le-Grand et se lie d'amitié avec Pierre Louÿs et André Gide, élèves de l'École alsacienne.
Se destinant à Saint-Cyr, il est influencé par ses amis, qui l'orientent vers la littérature. Il se met à fréquenter le café Voltaire, haut lieu du mouvement symboliste, et rédige un manifeste en faveur de la création d'un théâtre représentatif de ce groupe, ce qui lui vaut son renvoi du lycée.
À dix-sept ans, réduit au porte-à-porte pour financer ses idées, Paul Fort se trouve à la tête d'un théâtre d'avant-garde, le théâtre des Arts, créé pour faire échec au naturalisme du Théâtre-Libre. Il fait jouer des pièces d'auteurs anciens, Les Cenci de Shelley, La Tragique Histoire du docteur Faust de Marlowe, des poèmes non conçus pour la scène comme Le Soleil de minuit de Catulle Mendès, Le Concile féerique de Jules Laforgue, Le Guignon de Mallarmé, Le Corbeau d'Edgar Poe, La Fille aux mains coupées de Pierre Quillard (une réussite dans le genre) et d'autres encore signés Gourmont, Maeterlinck, Rachilde, Verlaine... Les décorateurs en sont Gauguin, Vuillard, Bonnard, Maurice Denis, Bernard Sérusier, et les acteurs bénévoles Marguerite Moreno, Suzanne Desprée, Lugné-Poe, de Max, Lucien Guitry.
En 1891, Fort épouse une jeune marchande de fleurs, et ses témoins sont Verlaine et Mallarmé. Quatre ans après sa création, le théâtre des Arts, laissé aux mains de Lugné-Poe, devient le théâtre de l'Œuvre. Paul Fort se consacre dès lors à la poésie. Fondateur de la revue Le Livre d'art en 1896, il crée Vers et Prose en 1905, publication dans laquelle écrit l'élite des symbolistes, et qui paraît jusqu'à la guerre de 1914. Aidé de Valéry, il tente en 1927 de faire renaître cette revue ; deux numéros seulement paraissent. Il publie en 1897 ses premières Ballades françaises, qui comporteront une cinquantaine de recueils ; parmi les plus célèbres, on peut citer La Ronde autour du monde (1922), La Tourangelle (1925), Les Fleurs de lys (1926), Le Livre des visions (1941), Un jardinier du jardin de France (1943), On loge à pied et à cheval (1947), Mon grand pays (1950), Empire de France (1953). Il écrit aussi des légendes dramatiques en vers, notamment Louis XI, curieux homme (1922), Ysabeau, présentée à l'Odéon en 1924, Les Compères du roi Louis, jouée à la Comédie-Française en 1927.
Il continue pendant ce temps à fréquenter les milieux artistiques et littéraires ; on le voit à Montmartre avec Picasso et Apollinaire, à Montparnasse, plus souvent, où il rencontre Germaine Tourangelle qui deviendra sa femme, après son veuvage, en 1956. Il part en sa compagnie faire une tournée de conférences dans le monde entier sur la poésie française. Il achète, en 1921, une propriété près de Montlhéry, où, jusqu'à la fin de sa vie, il connaît une semi-retraite.
Surnommé, par Frédéric Mistral, « la cigale du Nord », Paul Fort a chanté, pendant cinquante ans, sans tomber dans la monotonie, les provinces françaises, leurs légendes, leurs traditions, leurs richesses, leurs charmes, mêlés à des souvenirs de ses voyages et à des impressions personnelles. Poète folklorique, national peut-on dire, nourri de sève populaire, il est aussi poète lyrique et sentimental. Il loue l'amitié, l'amour, la fraternité humaine. Ces thèmes simples et universels sont célébrés dans une fantaisie sans cesse renouvelée. Il a dès ses débuts modifié la notion même de poème. Son originalité a contribué à donner la prépondérance au rythme par des vers libres, souples, qui s'apparentent plutôt à une prose cadencée où l'assonance joue un plus grand rôle que la rime. Il est aussi et surtout un puissant créateur d'images. En 1912, il avait été élu « prince des poètes ».[...]
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Écrit par
- Hélène LACAS : auteur
Classification
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NABIS
- Écrit par Antoine TERRASSE
- 3 183 mots
- 5 médias
Par Lugné-Poe aussi qui partagea un moment un atelier avec Bonnard, Vuillard et Maurice Denis, les nabis étaient entrés en contact avec Paul Fort qui, en 1890, à dix-huit ans, venait de fonder le Théâtre d'art, destiné, selon les termes de Pierre Louÿs, à « contredire par une rivalité active...