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HINDEMITH PAUL (1895-1963)

Pédagogue et théoricien

Paul Hindemith a formé et inspiré des élèves du monde entier, à Berlin, Yale, Harvard et Zurich, leur faisant découvrir la rigueur et la souplesse de l'écriture contrapuntique, reprenant en cela la voie tracée par Johannes Brahms (1833-1897) et surtout par Max Reger (1873-1916). Sans ce dernier qui composa des sonates, fugues, suites et variations aux formes classiques, l'œuvre de Hindemith ne serait certainement pas ce qu'elle fut.

Développant le sentiment tout à fait baroque de la couleur, Paul Hindemith est soucieux du timbre rare, des sonorités aux voix brutes ou râpeuses, telles celle du trombone, instrument peu favorisé par les compositeurs. En cela il est aussi le continuateur et le disciple d'Eduard Hanslick (1825-1904), pour qui l'arabesque sonore se suffit à elle-même dans on ne sait quel idéal de musique pure et abstraite, refusant toute possibilité de représentation affective : ce qui est assurément donner des armes aux pourfendeurs de Wagner, de Franck ou de Debussy. En France, à la même époque, des contemporains de Hindemith tels Erik Satie ou les musiciens du groupe des Six (Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc, Germaine Tailleferre) ont en commun avec lui de lutter contre le romantisme et l'impressionnisme en souhaitant l'avènement de l'objectivité en art. Hindemith est, en Allemagne, le représentant de cette tendance esthétique, marquée par l'effort soutenu vers la rigueur de l'écriture, vers une retenue « spirituelle » de la sensibilité.

Pour traduire musicalement cet idéal, Hindemith enseigne à développer les recherches harmoniques qui utilisent mieux les richesses d'un chromatisme, tout à la fois atonal et «  tonal ». Certes, les règles classiques de la tonalité sont dépassées, mais Hindemith pense que l'harmonie se fonde toujours sur un ton fondamental, les résonances naturelles étant à la base de sa théorie et assurant les attractions cadentielles du devenir musical. Ce faisant, il refuse le dodécaphonisme schönbergien.

Comme Igor Stravinski ou Darius Milhaud, il sait à l'occasion superposer les contrepoints rythmiques et une polyrythmie savante et, toujours, une solide construction formelle structure l'architecture de l'œuvre. En 1937, Hindemith publie le fruit de sa recherche dans Unterweisung im Tonsatz (Leçon de composition), où il justifie sa con-ception de l'harmonie en une somme qui tente d'expliquer les relations harmoniques de tous les styles d'écriture, du Moyen Âge à nos jours. Ses autres ouvrages didactiques ne font que développer cette théorie.

À ce propos, on a pu parler de « traditionalisme polyphonique » ou de néo-classicisme. En fait, Hindemith est parvenu à un « style très personnel où il n'y a plus de place pour l'humeur improvisatrice, ni pour la vanité du pur jeu sonore. Il écrit une musique savante, ce qui le rend difficilement accessible à bien des auditeurs. Et c'est justement ce caractère savant qui nous apparaît comme éminemment allemand. Hindemith oppose au post-romantisme, descriptif et décoratif, un art dont le sérieux artisanal et le renoncement conscient à chatouiller agréablement l'oreille remontent jusqu'à Bach » (H. Strobel).

Karlheinz Stockhausen, Hans Werner Henze, Giselher Klebe, Berndt Alois Zimmermann seront les représentants de cette génération de musiciens germaniques qui, bien qu'ils se soient détournés du chemin esthétique de Hindemith, ont subi son influence, parallèlement à celle de Stravinski, de Webern ou de Messiaen. Mais résonne encore le chant du « romantisme élargi » des dernières œuvres, plus chaud, plus lyrique, emplissant parfois son univers sonore de tendresse profonde et laissant sa place au verbe transfiguré, comme un défi lancé au théoricien (cantate Mainzer Umzug,[...]

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Écrit par

  • : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien

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Ferruccio Busoni - crédits : General Photographic Agency/ Hulton Archive/ Getty Images

Ferruccio Busoni

Matthias Goerne - crédits : Marion Kalter/ AKG-images

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