PUAUX PAUL (1920-1998)
Jean Vilar l'appelait affectueusement « mon évêque ». Car Paul Puaux était bien le fidèle entre les fidèles. Protestant des Cévennes – né le 25 août 1920 à La Voulte-sur-Rhône (Ardèche) –, instituteur communiste, résistant membre des F.F.I., devenu dans la foulée militant du théâtre populaire, il apporte son concours, en prenant en charge le rassemblement d'un public neuf, à la Semaine d'art lancée en 1947 à Avignon par René Char, Yvonne et Christian Zervos. Proposition est alors faite à Vilar, qui venait de créer au Vieux-Colombier Meurtre dans la cathédrale de T. S. Eliot, d'en donner une représentation. Ce sont trois créations que Vilar va donner : Richard II de Shakespeare, Tobie et Sara de Claudel, La Terrasse de midi de Maurice Clavel. Dès l'année suivante, la manifestation est devenue le festival d'Avignon. Puaux, embarqué et conquis, lui consacre, en bénévole, ses vacances, année après année, prenant leçon au côté de Jean Rouvet, organisateur hors pair du public.
La confiance et l'amitié se sont établies très tôt entre Vilar et Puaux. Quand, dans son livre Avignon en Festivals, celui-ci rappelle une réflexion de Vilar après une vive discussion : « Tu crains de me contredire ? Mais tu es là pour ça. C'est de cette manière que tu m'aides », on comprend la profondeur de l'entente scellée en 1963, Vilar associant alors Puaux à sa réflexion sur l'évolution du festival, et faisant de lui son administrateur permanent en 1966. Cette année-là, Puaux crée un Conseil culturel établissant les contacts avec les associations et apportant au festival une aide pratique – régie et propagande. Dans ce même livre, Puaux écrit : « Comment naît un coup de foudre ? Un homme et une ville peuvent-ils se trouver liés, comme deux êtres humains, par un accord évident et immédiat, qui marque le destin de l'un et de l'autre ? » Cela se rapporte à Vilar, mais est vrai également pour lui, son coup de foudre concernant aussi bien l'homme du festival que la ville elle-même. Quand, en 1968, les derniers contestataires de mai vinrent perturber le festival en prenant appui sur un Living Theatre inconséquent, Vilar tint tête aux trublions, crispé mais gardant son sang-froid sous les injures, et contenant même la colère d'un Puaux hors de lui.
À la mort de Vilar en 1971, Puaux lui succède à la direction du festival et le dirige pendant huit ans. Fidèle à l'idéal vilarien de théâtre populaire, il s'attache à le faire évoluer dans le sens de l'ouverture aux nouvelles formes artistiques (danse, cinéma, théâtre musical, mise en espace, théâtre pour jeunes spectateurs, expositions) accueillies par Vilar à partir de 1966. Rencontres (un rite, celles du Verger), colloques (depuis 1966), débats (initiés en 1968) et ateliers (dont la Cellule de création de Théâtre ouvert) se multiplient, tandis que s'ouvrent des lieux au-delà des remparts (Croix-des-Oiseaux, Champfleury), que des troupes arrivent d'au-delà des frontières (Bob Wilson, Merce Cunningham, Otomar Krejca). En 1979, Puaux renonce à la direction du festival et prend avec Melly, sa femme, celle de la Maison Jean-Vilar qu'il a fondée. Après un passage (1981-1983) à la présidence du conseil d'administration de l'Opéra de Paris, fidèle à Avignon et gardien du souvenir, il s'y consacre tout entier jusqu'à son dernier jour. Avec la disparition de l'homme-lige se clôt l'ère Vilar.
Bibliographie
L. Adler & A. Veinstein, 40 Ans de festival, Hachette-Festival d'Avignon, 1987 / C. David, in Avignon 50 festivals, ouvr. coll., Actes sud-Éd. locales de France, 1996 / P. Puaux, Avignon en Festivals, Hachette, 1983 / M. & P. Puaux, in Le Guide d'Avignon et son festival, ouvr. coll., La Manufacture, Besançon 1987,[...]
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Écrit par
- Raymonde TEMKINE
: ancienne élève de l'École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, critique dramatique de
Regards et des revuesEurope ,Théâtre/Public , auteur d'essais sur le théâtre
Classification
Autres références
-
FESTIVALS
- Écrit par Jean-Michel BRÈQUE , Matthieu CHÉREAU , Jean CHOLLET , Philippe DULAC , Encyclopædia Universalis , Christian MERLIN et Nicole QUENTIN-MAURER
- 17 230 mots
- 21 médias
Quand Jean Vilar meurt en 1971, son fidèle assistant Paul Puaux lui succède. Dans un même esprit militant, il élargit la programmation en renforçant son internationalisation et en faisant appel à une nouvelle génération de metteurs en scène et de chorégraphes. Après la démission de Paul Puaux en 1979,...