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PAUVRETÉ ET REVENUS MINIMA

Un revenu minimum : du R.M.I. au R.S.A.

Contrairement au revenu social garanti, le principe du revenu minimum consiste à ne verser une aide sociale qu'à ceux dont les autres revenus sont insuffisants, et pas à tous. Il s'agit, en outre, d'un revenu versé sans contrepartie. Certes , en France, la création du R.M.I. (revenu minimum d'insertion) en 1988 prévoyait la passation d'un contrat (dit d'insertion) entre l'allocataire et la collectivité, contrat devant préciser les engagements de l'allocataire (recherche d'emploi, formation, soins, etc.) et ceux de la collectivité (revenu). Le versement de l'allocation, limité dans le temps et révisable, devait être subordonné à cet engagement réciproque. Mais cette clause n'a pratiquement jamais été appliquée, alors même qu'à peine un allocataire sur deux avait signé ce « contrat d'insertion » : comment priver de ressources une personne qui n'a rien d'autre pour vivre ? D'ailleurs, les autres exemples de revenu minimum en Europe – le minimex belge, les supplementary benefits britanniques, etc. – sont ou étaient inconditionnels et automatiques, dès lors que les autres sources de revenus sont ou étaient inférieures au plafond prévu. Il s'agit, enfin, d'un revenu différentiel. Lorsque l'allocataire voit son revenu personnel augmenter (par exemple, lorsqu'il retrouve un travail), la prestation sociale est réduite d'autant. Certes, ce n'est pas immédiat : dans le cas du R.M.I., par exemple, un système dit d'intéressement permettait de cumuler partiellement R.M.I. et salaire, mais durant une période limitée (le trimestre ou l'année, selon les cas).

Les transformations du R.M.I.

En outre, au fil du temps, le R.M.I. a changé de nature. Il s'agissait au départ de boucher les trous d'une protection sociale principalement centrée sur ceux qui travaillent. Mais la montée du chômage de masse a peu à peu fait sauter les digues : avec les réformes successives de l'assurance chômage restreignant les droits à indemnisation en raison de l'énorme croissance du nombre des chômeurs, le R.M.I. est devenu le lot d'un nombre considérable de chômeurs ne parvenant pas à retrouver du travail. Au lieu d'être une main secourable tendue par la société à ceux qui s'enfoncent, il est devenu peu à peu une sorte d'assurance chômage au rabais pour exclus de l'assurance chômage, comme l'explique Marie-Thérèse Join-Lambert : « À partir de 1993, on a assisté à une montée spectaculaire des bénéficiaires du R.M.I. Il a fallu du temps pour réaliser que ce phénomène était lié non à un développement particulier des fraudes à la prestation ou d'une culture de l'assistance, mais à la montée du chômage et aux restrictions des systèmes d'indemnisation. » Ce qui avait vocation à n'être qu'une transition, le temps de reprendre pied dans la société, devint ainsi une source permanente de revenu pour certains, en raison de l'accumulation du chômage de longue ou de très longue durée, et de la dégradation de « l'employabilité » qui en résultait pour ceux qui en étaient victimes.

Aussi le R.M.I. suscita-t-il trois types de critiques, bien résumées par Alain Caillé : « Sa nature contractuelle en fait une prestation conditionnée à une obligation de comportement : il faut être un pauvre « méritant ». Le R.M.I. est révocable, ce qui place ses « bénéficiaires » dans une situation d'incertitude et de précarité peu propice à l'insertion dans un projet de vie à moyen et long termes. Enfin, il n'est pas cumulable avec d'autres ressources : il l'est temporairement, mais pas structurellement, si bien que lorsque des RMistes trouvent effectivement des sources de revenu complémentaires, ils sont confrontés à une alternative dramatique : soit –[...]

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Écrit par

  • : conseiller de la rédaction du journal Alternatives économiques

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