BALTES PAYS
D'une occupation l'autre
Leur situation géographique, entre le Reich et l'U.R.S.S., a une seconde fois associé le destin des trois pays. Annexés par Moscou à la suite du pacte germano-soviétique de 1939 qui mit un terme aux vingt années d'indépendance, les trois Républiques devinrent en 1940 des Républiques socialistes soviétiques.
La guerre germano-soviétique (22 juin 1941-1944) eut des conséquences tragiques. Outre l'extermination des Juifs en Lettonie et surtout en Lituanie, elle divisa les populations entre, d'un côté, ceux qui craignaient moins les nouveaux occupants allemands qu'un retour des Soviétiques et, de l'autre, les partisans de ces derniers. L'Armée rouge rentra en 1944 dans les Républiques baltiques non pas comme dans des régions libérées, mais comme dans des pays hostiles qu'il fallait soumettre.
Les mouvements de guérilla anti-allemande, appelés « Frères de la forêt », tournèrent alors leurs actions contre les troupes russes ; ils trouvèrent des soutiens dans les populations locales jusqu'au début des années 1950. Dès la réoccupation des trois pays, le pouvoir soviétique s'affirma dans tous les domaines, par de nouvelles déportations, par l'alignement de la vie quotidienne sur les normes du Kremlin et par la venue de très nombreux ouvriers et techniciens russophones. Cette politique fut sensible surtout en Estonie et en Lettonie où l'industrialisation autour des capitales était plus avancée : la population y devint majoritairement russe. La Lituanie, essentiellement agricole, attira moins de ces migrants.
Jusqu'à la mort de Staline (1953), la politique de Moscou fut de faire disparaître les « survivances nationalistes », politique de « communisation » qui eut plus de succès en Estonie et en Lettonie qu'en Lituanie. Avec la mort du dictateur, la situation évolua : les arrestations politiques cessèrent et beaucoup de déportés rentrèrent dans leur pays. Mais la vigilance de Moscou pendant le règne de Nikita Khrouchtchev ne se relâcha pas.
Après l'éviction de ce dernier en 1964, l'une des préoccupations majeures de Leonid Brejnev fut de faire reconnaître les frontières de l'U.R.S.S. issues de la Seconde Guerre mondiale, c'est-à-dire décidées lors du pacte germano-soviétique de 1939. Avec la signature des accords d'Helsinki le 1er août 1975, le dirigeant soviétique put croire qu'il avait atteint son but. Or il avait dû accepter que fût préconisée dans ces accords la libre circulation des hommes et des idées. Les intellectuels baltiques s'emparèrent de cette clause et formèrent des comités pour l'application des accords. Leurs activités, d'abord discrètes et facilement contenues par le pouvoir, se développèrent malgré la répression et, bientôt relayées par les médias internationaux, firent connaître au monde les réalités de la situation intérieure de l'U.R.S.S. Pendant la période dite de « stagnation » (début des années 1980), de nombreuses organisations se créèrent, manifestèrent et revendiquèrent (Appel des quarante-cinq Baltes à l'O.N.U. en 1979).
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Écrit par
- Suzanne CHAMPONNOIS : docteur de l'Université, ancien maître de conférences à l'Institut national des langues et civilisations orientales (histoire des pays Baltes)
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