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PCF (Parti communiste français)

La longue crise du Parti communiste français (depuis 1956)

À partir de 1956, le PCF entre progressivement dans la deuxième phase de son histoire, introduite par les effets délégitimants du XXe congrès du PCUS en 1956 et l'épuisement de la force propulsive du mouvement communiste international que manifestent la même année l'insurrection en Hongrie et les événements de Pologne. En discréditant Staline, en n'hésitant pas à le ridiculiser, le rapport « secret » de Nikita Khrouchtchev au XXe congrès du PCUS brise la relation enchantée qui faisait de Staline, pour les militants et cadres les plus investis par « l'esprit de parti », leur champion. La « relation magique d'identification » (Pierre Bourdieu) de ceux qui plaçaient en lui leurs espoirs se brise, déséquilibrant toute la chaîne du capital symbolique communiste qui reposait d'un côté sur le culte de Staline et de l'autre sur le capital délégué d'autorité politique dont bénéficiaient les partis communistes et les communistes eux-mêmes. La configuration du pouvoir symbolique, centrée sur Staline, qui caractérisait les relations de pouvoir au sein des partis communistes de l'époque stalinienne, s'adossait à une cléricalisation particulière au monde communiste. La canonisation de textes (constamment remaniés et/ou différemment « préfacés » suivant les conjonctures), la sacralisation de leurs auteurs (Marx, Engels, Lénine) et du rapport à la lecture de leurs textes, la promotion de Staline lui-même enfin comme exégète « autorisé » et seul authentique disciple structuraient le dispositif du mode de production ecclésial de la « doctrine du parti ».

La mort de Staline en 1953 entraîne la crise de cette configuration. Désormais, l'autorité politique doit reposer sur d'autres fondements. Le déclin du PCF peut s'analyser pour partie comme la conséquence de l'échec de cette recherche de nouveaux fondements de l'autorité politique communiste. C'est dans la plus grande confusion que se sont imbriquées, à des rythmes divers, ces logiques de renouvellement ou d'aggiornamento qui ont irrigué inégalement le Parti communiste. Trois périodes de cette crise du communisme français peuvent être dégagées. À l'aggiornamento inabouti (1956-1977) succède une période de débandade du Parti communiste (1978-1993) qui ne laisse bientôt plus d'autre choix que l'investissement dans les technologies du marketing politique (1994-2002).

Aggiornamento et union de la gauche (1956-1977)

Du début des années 1960 à la rupture de l'union de la gauche en 1977, le premier aggiornamento, « mouvement complexe où la révision théorique, la pratique des alliances électorales, le renouvellement du personnel dirigeant et le nouveau statut concédé aux intellectuels s'appellent les uns les autres » (Frédérique Matonti), s'est traduit par la refonte de très nombreux invariants rhétoriques de l'édifice doctrinal de l'époque stalinienne et par la recherche de règles nouvelles de fonctionnement interne. Principalement conduite par Waldeck Rochet (secrétaire général du PCF de 1964 à 1969) puis par Georges Marchais (1969-1994), cette politique de renouvellement s'effectue dans une conjoncture de montée de la gauche et de mobilisation collective (Mai-68) qui la nourrit d'une sorte d'énergie politique jusqu'à l'élection de François Mitterrand en 1981.

Un rapide bilan des évolutions doctrinales depuis l'époque stalinienne montre l'ampleur des changements. Dans une première phase, c'est la stratégie politique qui fait l'objet d'un ensemble de réorientations doctrinales. Après l'abandon de la thèse du parti unique en régime communiste (XVIe congrès, 1961), la revendication d'une voie française au socialisme rompant explicitement avec[...]

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Manifestation communiste - crédits : Picture Post/ Getty Images

Manifestation communiste

Maurice Thorez, 1947 - crédits : Keystone/ Getty Images

Maurice Thorez, 1947

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Georges Marchais, 1981

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