PÉDAGOGIE Les approches contemporaines
1975-1990 : années de pragmatisme
À partir de 1974, en Europe occidentale, diverses tentatives sont perceptibles qui s'essaient à reformuler des stratégies éducatives. Ainsi peut-on constater une nette évolution des esprits en ce qui concerne, par exemple, l'éducation des adultes (cf. B. Schwartz, 1977 ; M. Lesne, 1977 ; P. Dominicé, 1979 ; C. Pantillon, 1983), la formation des enseignants (G. Ferry, 1983) ou la pédagogie universitaire (comme le marque la création, en 1979, d'une Association internationale francophone qui publie la revue Pédagogiques à l'initiative du Québec). Guy Avanzini (1975) a analysé ce phénomène global du début des années 1970 comme l'apogée puis la retombée des « maximalismes ». Les pédagogues « activistes », qu'ils soient libertaires ou technologistes, ont trop demandé au système d'enseignement. Et leurs interlocuteurs, quant à eux, en ont aussi trop attendu. L'itinéraire de l'essayiste américain Neil Postman illustre bien l'évolution qui s'est produite. Avec Weingartner dans la foulée des mouvements contestataires américains de 1967, il s'était fait connaître par son livre Teaching as a Subversive Activity (1969). Il y assignait à l'éducation scolaire la tâche de subvertir la culture reçue du passé. Dix ans après, cet enseignant, qui prétend bien ne pas être devenu un réactionnaire, voit l'avenir de l'école dans une pure et dure résistance à la culture que distillent les mass media et dont il dénonce la perversité éducative. Une dénonciation voisine est perceptible chez un « homme de gauche » comme M. T. Maschino quand, en 1982, il parvient à cette conclusion, dont il fait le titre provocateur d'un essai sur l'enseignement : Vos enfants ne m'intéressent plus.
Bien des éducateurs scolaires ont désormais la conviction qu'un « autrement » de la pédagogie est concevable et souhaitable, mais qu'il faut le chercher « ailleurs ». Ivan Illich (1971) – et, à sa suite, Verne et Dauber (1975) – s'était fait le héraut d'une société déscolarisée où les réseaux éducatifs retrouveraient leur qualité « conviviale ». Certains quitteront ainsi le navire pour explorer de nouvelles formes « alternatives » (dans le sens des free schools ou de l'« école active ») ou pour situer leur action entre formation et thérapie (cf. Max Pagès, Le Travail amoureux, 1978). D'autres encore chercheront, à l'extérieur de l'école, la notoriété littéraire, tel Claude Duneton (Je suis comme une truie qui doute, 1976). On assistera, en même temps, à un certain « exil de l'intérieur » des « saltimbanques » de la pédagogie, non sans désengagement ni attentisme de la part de beaucoup, non sans surcroît d'initiative et d'invention chez d'autres. Ces derniers – en France, par exemple, après 1981 – escomptent des rapports demandés par le nouveau ministère à des pédagogues de haute notoriété (A. de Peretti, B. Schwartz, L. Legrand, A. Prost) une stimulation nouvelle de l'action pédagogique, une meilleure formation initiale et continue des maîtres, et la prise en compte de la « créativité » des praticiens nonobstant la pesanteur de l'appareil administratif et les habitudes du grand nombre. Les « mouvements pédagogiques » reprennent vigueur et espoir (G.F.E.N., C.R.A.P., C.E.M.E.A., C.E.P.I., équipes Freinet...) et tentent, avec des bonheurs divers, de se présenter en interlocuteurs des pouvoirs publics et des instances traditionnelles de la formation et de la recherche. Quoi qu'il en soit, le slogan écologiste de E. F. Schumacher (1978) semble avoir été entendu : « Small is beautiful ». Chercher des lieux modestes où il soit possible, avec d'autres, de faire quelque chose, tel semble le leitmotiv de ceux qui ont vécu[...]
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Écrit par
- Daniel HAMELINE : professeur honoraire de l'université de Genève
- Jacques PAIN : professeur des Universités en sciences de l'éducation à l'université de Paris-X-Nanterre
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