ACHILLE PEINTRE D' (actif env. 460-430 av. J.-C.)
Le décorateur de vases attiques que l'on désigne ainsi, d'après le nom du héros qu'il a magnifiquement campé sur une amphore du musée du Vatican considérée comme un de ses chefs-d'œuvre, est un des meilleurs représentants du premier style classique dans la peinture grecque sur vases. Élève du Peintre de Berlin, l'un des grands maîtres du début du ~ ve siècle, le Peintre d'Achille s'exprime, comme lui, à la fois dans la vieille technique des figures noires, pour la décoration de cette catégorie particulière de vases à caractère religieux que sont les amphores panathénaïques, et, plus souvent, dans la technique des figures rouges ; mais il utilise aussi, pour bon nombre de ses œuvres les plus belles, une troisième technique qui se développe dans le courant du ~ ve siècle pour quelques vases particuliers, principalement des lécythes (type de vases à parfum), à destination funéraire, et que l'on nomme peinture à fond blanc, car il s'agit désormais d'une véritable peinture, avec dessin au trait de contour et emploi de plusieurs couleurs vives (rouge, violet, noir, jaune, ocre, bleu, vert parfois) qui se détachent sur un fond blanc laiteux, obtenu au moyen d'un engobe recouvrant l'argile naturelle. Le Peintre d'Achille n'est pas l'inventeur de cette polychromie qui, à cause de sa fragilité, fut toujours réservée à des vases d'offrande ou d'apparat, sans finalité pratique, mais il en est, à la fois par le nombre et par la qualité des œuvres, un des plus grands utilisateurs. On lui attribue en effet à ce jour cinq amphores panathénaïques, décorées de figures noires puissantes héritées du Peintre de Berlin, plus de cent vases à figures rouges, presque tous d'assez grande taille, et surtout une bonne centaine de vases à fond blanc, tous des lécythes.
Tout au long de sa carrière, le Peintre d'Achille doit beaucoup au Peintre de Berlin. Dès ses premières œuvres, il s'attache à une présentation très soignée des personnages, qu'il dessine d'une façon rigoureuse, avec tous les détails de leur anatomie (par exemple l'homme et le guerrier figurés sur l'une des faces du cratère en cloche du New York Metropolitan Museum, 07.286.81), mais les attitudes sont quelquefois un peu guindées. Dans les œuvres de sa maturité, il est capable d'insuffler à ses personnages une grandeur quasi monumentale qui convient particulièrement à des héros (ainsi à l'Achille de l'amphore du Vatican déjà signalée), et il sait les présenter dans des attitudes parfaitement naturelles, conformément aux conquêtes du style « libre » (cf. notice : Niobides [Peintre des]) et aussi sans doute sous l'influence des tendances nouvelles de la sculpture du milieu du ~ ve siècle, en particulier de Polyclète, puis de Phidias : le corps des personnages debout prend appui désormais nettement sur une seule jambe, et un léger déhanchement apporte à la pose cet élément presque impondérable qui évite la lourdeur à une figure pourtant assez massive, comme le montre bien la représentation d'Achille déjà citée.
Dans ses lécythes à fond blanc, la grandeur se tempère d'une certaine grâce, qui tient à la souplesse des attitudes et des vêtements, et souvent d'une note de sentimentalité, sinon de mélancolie, créée par l'air de concentration, presque de méditation, que montrent beaucoup de personnages, comme maintes figures sculptées par Phidias sur la frise du Parthénon (ainsi les deux Muses placées face à face, dans le cadre du mont Hélicon, sur le lécythe de Munich, Museum antiker Kleinkunst, anciennement dans la collection Schoen à Lugano).
On a l'impression, dans les œuvres les plus réussies, qu'une sorte de contact spirituel s'établit entre les deux personnages qui se font face, en particulier dans les scènes d'adieu[...]
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Écrit par
- Jean-Jacques MAFFRE : ancien membre de l'École française d'archéologie d'Athènes, docteur ès lettres, professeur de civilisation grecque à la Sorbonne (Paris IV)
Classification
Médias