PEINTURE DE GENRE
La notion de peinture de genre désigne l'illustration de scènes de la vie quotidienne, dont les personnages sont des types humains anonymes. Utilisée à l'origine pour tous les genres de peintures à l'exception de la peinture d'histoire, l’expression ne trouva son acception actuelle qu'à la fin du xviiie siècle. En 1766, Diderot écrivait ainsi : « On appelle du nom de peintres de genre indistinctement et ceux qui ne s'occupent que des fleurs, des fruits, des animaux, des bois, des forêts, des montagnes, et ceux qui empruntent leurs scènes à la vie commune et domestique » (Essais sur la peinture). Mais, en 1791, Quatremère de Quincy évoque le « genre proprement dit, ou celui des scènes bourgeoises » (Considérations sur les arts du dessin en France) : il devient ainsi le premier théoricien à appliquer le terme de « genre » à des représentations de la vie domestique. Cet usage ne devient courant que vers le milieu du xixe siècle.
Cette catégorie picturale met en jeu la notion de réalisme, qui ne se réduit pas à la description objective de la réalité, mais est inséparable de contenus idéologiques plus ou moins apparents. Le tableau de genre camoufle ainsi souvent des significations allégoriques, morales ou religieuses complexes, qui s'expliquent en grande partie par le contexte de production. Le réalisme ne lie pas les mains du peintre, qui peut multiplier les tonalités (satirique, didactique, sentimentale...) dans son interprétation de sujets consacrés par la tradition ou la mode. L'évolution chronologique consacre pourtant la sécularisation du genre, qui privilégie de plus en plus la description et l'anecdote.
Les origines d’une catégorie picturale
Les hésitations terminologiques traduisent la genèse d'une catégorie picturale qui, comme les autres genres dits inférieurs, est issue de l'art religieux et de l'art de cour. Les représentations de la vie domestique, du travail et des divertissements semblent avoir constitué un genre autonome dans la peinture antique, mais dans le monde occidental chrétien, elles apparaissent à l'époque médiévale dans les enluminures des manuscrits et sur certains vitraux, comme des détails accessoires et marginaux (parerga) de l'iconographie religieuse. Les thèmes, assez limités, traduisent le plus souvent des intentions symboliques : représentations des métiers, des travaux liés aux cycles du temps, allégories des cinq sens, allégories des vices et des vertus. À l'âge gothique, la société de cour contribue à l'émergence de l'art profane à travers l'illustration des romans courtois et épiques et le développement d'objets de luxe, comme la tapisserie. La représentation d'une vie seigneuriale idéalisée met en scène les bergers de la tradition pastorale héritée de Virgile, le jardin d'amour montrant des couples occupés à des jeux amoureux, ou encore les distractions aristocratiques comme la chasse (les fresques de la chambre de la Garde-Robe du palais des Papes à Avignon, 1343). La thématique des activités quotidiennes rurales et urbaines peut également servir indirectement un discours politique : la grande fresque d'Ambrogio Lorenzetti sur les Effets du bon et du mauvais gouvernement, 1338-1340, exalte le gouvernement municipal de Sienne (Palazzo Pubblico, Sienne), et Jean de Limbourg, illustrant les mois dans les Très Riches Heures du duc de Berry, 1413-1416 (musée Condé, Chantilly), célèbre les fastes de la cour de son commanditaire.
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Écrit par
- Anne le PAS de SÉCHEVAL : maître de conférences à l'université de Paris-X-Nanterre
Classification
Médias
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