PEINTURE Les catégories
La peinture a toujours répondu à deux appels bien distincts : la décoration des monuments et des habitations d'une part, la délectation de l'amateur d'autre part. Dans sa fonction décorative, elle rivalise avec d'autres arts à deux dimensions, vitrail ou tapisserie, et l'emporte sur eux par sa capacité à couvrir rapidement de grandes surfaces, et cela sans frais excessifs, ce qui n'est pas le cas de la mosaïque, art qui lui est rattaché d'ordinaire. Sa fonction de délectation suppose l'existence d'une clientèle cultivée et fortunée, capable de commander ou d'acheter des tableaux « mobiles ».
L'amateur de peinture, au xxe siècle, est profondément convaincu que la qualité d'un tableau est indépendante de son sujet. Mais c'est une idée qui ne s'est accréditée que récemment, après un conflit qui a occupé une bonne part du xixe siècle. Jusqu'à l'époque de Manet, une doctrine tout opposée, élaborée dès la Renaissance, a régné presque sans discussion, qui mettait au-dessus des autres genres la peinture d'histoire.
La division de la peinture de chevalet en genres est assez claire et peut être schématisée ainsi : la peinture d'histoire, qui se divise en peinture religieuse et en peinture dont le sujet est tiré de l'histoire ou de la fable ; le portrait ; la peinture de genre ; le paysage ; la nature morte. Toutefois, les difficultés apparaissent quand on veut préciser chacune de ces catégories : ainsi des tableaux qui ressemblent à des paysages peuvent contenir une scène, une Fuite en Égypte par exemple, et participer de la peinture d'histoire ; d'autre part, une mauvaise lecture d'un tableau d'histoire – ainsi une scène biblique rarement représentée – le transforme en tableau de genre dont, par nature, les personnages sont anonymes, et à supposer qu'un spectateur ne sache pas que la nudité dans l'art ancien est un attribut de la divinité, il pourrait prendre une représentation de Vénus pour un tableau « de genre » (le nu n'est pas un genre, cf. nu).
La peinture monumentale
Définition
Si le critère essentiel de la peinture monumentale est de faire partie du mur qu'elle décore, il n'en faut pas moins nuancer une telle affirmation : un grand tableau encastré dans une boiserie, un dessus de cheminée ne sont pas fondamentalement différents d'une peinture marouflée qui sera toujours tenue pour une peinture monumentale ; certaines peintures murales pompéiennes, de petite ou moyenne dimension, ne sont que des reproductions de tableaux de chevalet disparus. La peinture murale semble avoir été plus continuellement et plus généralement pratiquée que la peinture de chevalet, mais sa conservation a été plus difficile. Elle est en effet d'un entretien malaisé, et ajoute à ses propres risques de destruction celles du mur ou du plafond dont elle fait partie. Les techniques, aujourd'hui bien au point, qui permettent de détacher la peinture murale de son support et de la mettre en lieu sûr dans un musée n'en modifient pas moins radicalement la nature et l'effet de cette peinture. La fréquence des destructions fausse gravement l'idée que l'on a de la peinture ancienne en exagérant l'importance historique du tableau de chevalet. Le cas est exactement inverse pour l'Antiquité, au cours de laquelle les deux catégories de peinture sont attestées, mais dont on ne possède plus de tableaux de chevalet. Ceux-ci furent d'abord seulement des tableaux votifs, puis, peut-être à partir du ive siècle, des œuvres pour collectionneurs. La première pinacothèque, installée à Athènes dans les Propylées, possédait, selon Pausanias, des œuvres de différents peintres, dont Polygnote. Le plus souvent, les tableaux comportaient des volets mobiles, comme les retables de la fin du Moyen Âge :[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Antoine SCHNAPPER : professeur d'histoire de l'art à l'université de Paris-IV-Sorbonne
Classification
Médias
Autres références
-
ALLEMAND ART
- Écrit par Pierre VAISSE
- 1 322 mots
Parler d'art allemand, comme d'art italien ou d'art français, n'a rien qui surprenne aujourd'hui, tant ces catégories semblent évidentes. Apparues avec l'essor de l'histoire de l'art au xixe siècle, elles sont pourtant relatives et problématiques, car cet essor,...
-
ANNEXES - DE L'ŒUVRE D'ART (J.-C. Lebensztejn) - Fiche de lecture
- Écrit par Gilles A. TIBERGHIEN
- 972 mots
Les éditionsLa Part de l'Œil, ont eu l'heureuse idée de publier, en 1999, dans la collection « Théorie », un recueil de textes de Jean-Claude Lebensztejn. Ces Annexes caractérisent bien la manière de Lebensztejn, car même ses grands livres – L'Art de la tache (éditions...
-
ART (Le discours sur l'art) - Sémiologie de l'art
- Écrit par Louis MARIN
- 3 569 mots
On prendra comme exemple privilégiél'objet pictural : le tableau est un texte figuratif et un système de lecture. Il se voit globalement, comme une totalité qui implique non seulement un point de vue qu'éventuellement un code perspectif peut déterminer, mais aussi le retranchement de l'espace du... -
ART & THÉOLOGIE
- Écrit par Georges DIDI-HUBERMAN
- 6 741 mots
- 1 média
...époque nouvelle où tente de se fixer une iconographie – iconographie d'où la création artistique tendra progressivement à s'échapper. Lorsqu'on regarde attentivement une séquence biblique de Giotto, un Arbre de la croix de Taddeo Gaddi, un Christ mort de Lorenzetti, une Trinité... - Afficher les 27 références