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PEINTURE MÉTAPHYSIQUE

L'aventure métaphysique

Chirico fut le premier à se lancer dans cette voie ; dès 1910, il crée, à contre-courant de toutes les tendances de l'art moderne, une œuvre dont, plus tard, Carrà et Morandi se réclamèrent avec passion. Né en 1888, à Volo, en Grèce, où son père, ingénieur italien, avait été chargé de construire un réseau de chemins de fer, Chirico entre, en 1900, à l'Institut polytechnique d'Athènes ; il y fréquente les cours de dessin et de peinture. À la mort de son père, vers 1905, il voyage en Europe avec sa famille, et un séjour de deux ans que celle-ci fait à Munich permet d'inscrire le jeune garçon à l'Académie des beaux-arts. C'est au cours de ces deux années que Chirico approche les œuvres de peintres romantiques et visionnaires allemands. Arnold Böcklin et Max Klinger frappèrent plus particulièrement son imagination. Chirico a parlé lui-même d'influence et a publié, dans Il Convegno, deux articles datés de mars et novembre 1920 consacrés à ces deux artistes. Si l'influence de Böcklin est directement perceptible dans la production de Chirico, celle de Max Klinger est plus difficile à définir, car c'est l'utilisation de l'onirisme, mis au service des représentations plastiques, qui fascine le peintre. La série de lithographies ayant pour thème « le gant » paraît à ce dernier « emplie d'une fantaisie de rêveur et de conteur ténébreuse et infiniment mélancolique ». Ce ne sont pas les objets représentés qui retiennent son attention, mais l'ordre dans lequel ils sont agencés. Cet ordre figuratif, où des éléments non complémentaires se trouvent rassemblés grâce au travail du rêve, deviendra le point de départ des recherches futures ; c'est le rapport entre le rêve et le rêveur qui capte l'intérêt de Chirico. Il discerne, dans cette narration onirique, différentes étapes et s'attarde sur les composantes fantastiques qui structurent l'image. Pour lui, « Klinger possède le sens dramatique de certains passages des drames cinématographiques où des personnages de la tragédie et de la vie moderne nous apparaissent figés dans une ambiance fantomatique au milieu de décors terriblement réels ». Ce mélange d'éléments théâtraux coexistant avec les éléments de la vie quotidienne et un monde fantomatique à l'immobilité figée semble bien préfigurer la démarche métaphysique. Après son séjour à Munich, Chirico retourne à Milan en 1910 ; année féconde, car il peint une série de tableaux où les influences commencent à se dissoudre dans une conception de l'espace et des personnages plus personnelle. 1910 est marqué par deux toiles constituant un tournant décisif dans sa carrière : L'Énigme d'un après-midi d'automne et L'Énigme de l'oracle. Avec ces œuvres, il dépasse les limites des représentations antérieures en établissant les données principales de la démarche métaphysique. C'est le début de la recherche systématique du dépaysement pictural.

En 1917, alors que la grammaire figurative de Chirico était déjà solidement définie, Carlo Carrà s'engage dans une voie analogue. Ce peintre (né en 1881 à Quargnento, près d'Alessandria, mort en 1966 à Milan) avait joué un rôle très important dans le mouvement futuriste. Mais déjà quelques œuvres réalisées entre 1915 et 1916 annonçaient l'abandon d'une certaine optique futuriste et la recherche d'un nouvel équilibre résultant d'un compromis entre dynamisme et immobilité.

Ce n'est qu'en 1919 que Giorgio Morandi (cf. morandi) se joignit à ces deux artistes. Le « groupe métaphysique » ainsi constitué a prolongé son activité jusqu'en 1920.

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense

Classification

Autres références

  • CARRÀ CARLO (1881-1966)

    • Écrit par
    • 364 mots

    Peintre italien, né le 11 février 1881 à Quargnento, dans le Piémont, mort le 13 avril 1966 à Milan.

    Autodidacte, Carlo Carrà suit de brèves études de peinture à l'académie Brera à Milan. En 1909, au contact de l'écrivain Filippo Marinetti et de l'artiste Umberto Boccioni...

  • DE CHIRICO GIORGIO (1888-1978)

    • Écrit par
    • 1 728 mots
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  • MORANDI GIORGIO (1890-1964)

    • Écrit par
    • 1 101 mots
    ...matérielle. Dès lors, l'œuvre de Morandi s'ouvre à nouveau aux sollicitations extérieures. C'est entre 1919 et 1922 qu'il participera à l'activité du groupe des peintres métaphysiques. L'exposition de la Primaverile fiorentina à Florence, à laquelle il prend part avec Giorgio De Chirico, Carlo Carrà et...
  • PERSPECTIVE

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    • 22 médias
    ...terme aux recherches sur les potentialités expressives de la perspective : que l'on pense aux projections exaspérées qui sous-tendent les énigmes de la peinture métaphysique (Giorgio De Chirico) ou aux subtils sortilèges perspectifs créés par Paul Klee au cours de ses années de travail au Bauhaus....