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PÉRICLÈS (env. 495-429 av. J.-C.)

Pendant des décennies, Périclès a été le maître incontesté d'Athènes, par la volonté du peuple qui l'élisait chaque année parmi les dix stratèges. Comme Thucydide l'a dit avec force (II, lxv) : « En apparence c'était la démocratie, en réalité le gouvernement d'un seul. » Mais cette situation ne s'explique pas par son seul génie : il a profité d'un équilibre social, au reste renforcé par ses mesures hardies, qui rendait solidaires les paysans de l'Attique, les artisans et les commerçants d'Athènes et les marins du Pirée, solidaires aussi les citoyens et les métèques, enrichis par la prodigieuse expansion économique d'Athènes.

Il a mérité de donner son nom à tout un siècle, celui de la grandeur d'Athènes, devenue grâce à lui l'« école de la Grèce » (Thucydide, II, xli), mérité aussi d'être rangé par Aristote (Éthique à Nicomaque, VI, 5, 1140 b 7) parmi les hommes d'État sages (phronimoi), c'est-à-dire ceux qui modèlent leur politique sur un idéal raisonné.

Périclès entre dans la vie publique alors que pâlit l'étoile de l'aristocrate Cimon et que se développe un vif mouvement démocratique, conséquence tardive des guerres médiques où Athènes n'avait pu remporter sa paradoxale victoire que par les sacrifices du démos tout entier. Vite investi de la confiance du peuple, il est réélu stratège pendant quinze années successives. C'est donc dans le cadre de la constitution clisthénienne, sans occuper de magistrature exceptionnelle, qu'il dirige en fait une cité sensible au prestige de son génie et qui fait sienne la politique à la fois pragmatique et idéaliste qu'il lui propose.

Le personnage

Périclès descend de deux familles nobles d'Athènes. Il est le fils du Bouzyge Xanthippe, chef démocrate, ostracisé par le peuple ; par sa mère Agaristé, nièce de Clisthène, le grand réformateur qui a fait accomplir à la cité les pas décisifs sur la voie de la démocratie, il appartient aux Alcméonides, un illustre génos de tradition démocratique.

Deux de ses maîtres semblent avoir exercé sur lui une influence de premier plan : Damon d'Oa, qui professe la croyance au progrès continu, et Anaxagore de Clazomènes, le prophète du nous, de la raison humaine organisatrice du cosmos livré d'abord au chaos.

On peut se représenter Périclès grâce au buste de Crésilas dont il reste plusieurs copies : les traits fins et graves, le visage animé par la méditation intérieure, lucide et énergique à la fois. Il vit simplement, malgré une solide fortune, et les siens le lui reprochent amèrement. Très réservé, un peu hautain peut-être (le comique Ion le peint « plein de hauteur et de fierté dans les manières »), il n'est en rien un démagogue. Il parle peu à l'assemblée du peuple, mais, quand il prend la parole dans les moments de crise, il déploie une éloquence que ses contemporains ont qualifiée d'olympienne, fustigeant et exaltant à la fois ses auditeurs. Parfaitement maître de lui, impassible, il ne sourit pas et on ne l'a vu pleurer qu'en deux occasions, lors du procès d' Aspasie, et à la mort de son dernier fils. Ce qui n'ôte rien à son humanité profonde, qui apparaît dans ses dernières paroles, sur son lit de mort : « Ce qu'il y a de plus grand et de plus glorieux dans ma vie, c'est que jamais je n'ai fait prendre le deuil à aucun Athénien. »

Ce lettré, cet admirateur des philosophes et des sophistes, qui ne craint pas de passer toute une journée à discuter avec Protagoras d'Abdère de problèmes de responsabilité criminelle, vit dans un cercle d'amis où l'on compte les esprits les plus nobles d'Athènes, Hérodote, Anaxagore, Sophocle, Protagoras, Hippodamos, Phidias. Ils entourent sa concubine, la Milésienne Aspasie, pour qui il[...]

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