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PÉRICLÈS (env. 495-429 av. J.-C.)

L'impérialisme de Périclès

Athènes et ses alliés

Si Athènes est forte et riche, c'est en grande partie à son empire qu'elle le doit. Dans le développement de cette puissance impériale, Périclès est l'héritier de tous ceux qui ont conseillé le peuple d'Athènes, depuis les guerres médiques, le démocrate Thémistocle, le modéré Aristide, l'aristocrate Cimon, mais il accélère nettement l'évolution de la confédération de Délos, qui avait été à l'origine une libre association de cités autour d'Athènes en vue de se prémunir contre un retour en force du Grand Roi, vers un empire (archè) où Athènes impose sa volonté à ses alliés, devenus en fait ses sujets. En 454, par une décision symbolique, Périclès fait transporter le trésor fédéral de Délos sur l'Acropole d'Athènes. Une série de mesures précises renforcent ensuite l'organisation centralisatrice au bénéfice exclusif d'Athènes : le décret de Cléarchos interdit tout monnayage d'argent aux alliés et impose à tous les poids et mesures athéniens ; le décret de Cleinias établit un système rigoureux pour la perception du tribut ; enfin, l'empire est divisé en cinq districts, ce qui améliore la perception du tribut (phoros) versé à Athènes par les alliés. De plus en plus, le trésor fédéral est utilisé aux seules fins d'Athènes pour subvenir aux besoins des grands chantiers de travaux publics et pour célébrer les fêtes avec plus d'éclat. Le chef des aristocrates, Thucydide, fils de Mélésias, reproche durement cette politique à Périclès, déclarant que « les sommes versées pour les besoins de la guerre servent à dorer et à parer la ville comme une coquette, à la surcharger de pierres précieuses, de statues et de temples de mille talents » (Plutarque, Vie de Périclès, XII). Périclès a beau jeu de répondre qu'Athènes remplit fidèlement ses obligations, puisqu'elle assure efficacement la défense commune contre les Barbares, et que c'est à bon droit qu'elle utilise à son gré les tributs. Il est suivi par le peuple athénien qui frappe Thucydide d'ostracisme en 443.

Certaines cités puissantes parmi les alliés ne supportent pas cette mainmise renforcée d'Athènes et l'on enregistre des révoltes, comme il y en avait déjà eu sous Cimon : les plus importantes sont celles de l'Eubée en 446 et de Samos en 441. De nouvelles colonies militaires sont fondées, les unes sur les marges du monde barbare (Hellespont, Thrace), les autres chez les alliés remuants (Eubée, Naxos). L'empire continue de ce fait à s'étendre, notamment en Asie Mineure et dans le Pont-Euxin à la suite d'une démonstration navale menée par Périclès en personne.

Si Périclès intervient ainsi lui-même, comme un peu plus tôt contre Samos révoltée, c'est que l'empire est au cœur de la puissance athénienne. Par leurs contributions, les cités sujettes permettent à Athènes de disposer d'une flotte de guerre exceptionnellement puissante, grâce à laquelle elle fait la loi dans toute la Méditerranée orientale, de disposer aussi de finances solides qui autorisent une politique sociale aux larges vues. Démocratie et impérialisme sont indissolublement liés : ce sont les tributs qui permettent d'assurer largement les misthoi, base de l'extinction du paupérisme. On est frappé, en lisant les discours que Thucydide prête à Périclès, du cynisme qui s'y étale : Athènes a la force pour elle, elle se doit de l'utiliser au maximum. D'où cette contradiction frappante : Athènes a développé la première forme de démocratie véritable, rendant le peuple maître de son destin, mais elle n'a pu le faire qu'en exploitant les alliés qui s'étaient remis à elle et en les privant de leur autonomie. Elle cueillera d'ailleurs les fruits amers de ses outrances, car l'empire s'écroulera d'une[...]

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