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PÉRIÉGÈSE DE LA GRÈCE, Pausanias Fiche de lecture

Un guide orienté

Le texte de Pausanias est hybride. C'est bien un guide : un livre que l'on emporte avec soi pour visiter à meilleur escient une région ou un lieu. Outre des indications routières (« à partir de là, le grand chemin de Delphes commence à monter davantage et devient plus pénible pour qui voyage à pied » ; X, 5, 5), Pausanias donne la position respective des monuments qu'il mentionne et parfois un conseil : « pour plus d'information, entrer en contact avec le clergé local » (I, 22, 3). Mais ce guide n'est pas complet. D'abord, Pausanias n'est pas allé partout : en Attique, l'important sanctuaire de Brauron est escamoté (I, 33, 1) ; à Delphes, toute la partie supérieure du sanctuaire d'Apollon, au-dessus de la terrasse du temple, est passée sous silence, sauf le bâtiment dédié par les Cnidiens, où les peintures murales de Polygnote le retiennent longuement, et l'erreur grossière qu'il commet sur le matériau du stade (X, 32, 1) suggère qu'il n'y est pas monté. Surtout, Pausanias ne mentionne pas tout ce qu'il a vu, loin de là : il choisit les œuvres d'art qui lui paraissent « dignes d'être vues » et les faits « dignes d'intérêt », qu'ils soient historiques ou religieux. Son ouvrage propose ainsi un choix restreint d'antiquités religieuses, où le commentaire l'emporte de beaucoup sur la description, sauf dans le cas d'œuvres complexes et très célèbres : à Olympie, le coffre de Kypsélos (V, 17,5-19) et la statue chryséléphantine de Zeus par Phidias (V, 11) ; à Delphes, les peintures de Polygnote (X, 25-31). Enfin, un grand nombre de réflexions ou d'informations marginales constitueraient aujourd'hui des notes, tandis que certaines longues digressions sont de véritables appendices, historiques ou mythologiques. C'est ainsi que la mention d'un portrait de stratège athénien entraîne un long développement sur l'invasion des Galates (I, 4) au début du iiie siècle avant J.-C. et celle d'un portrait de Pyrrhus, une biographie complète de ce roi (I, 11-13). Le livre IV fournit un exemple extrême, avec un historique liminaire de la Messénie en vingt-neuf chapitres, alors que le guide proprement dit n'en occupe que sept.

Depuis que les fouilles de la fin du xixe siècle ont dégagé complètement, à Olympie, à Athènes et à Delphes, les grands sanctuaires où Pausanias s'est attardé, on a pu mesurer précisément le rapport de son texte avec la réalité. Après un temps de dénigrement dû à la déception des archéologues, dépités par la minceur de son choix et par les énigmes irritantes que proposent ses formulations floues ou elliptiques, on s'est avisé depuis une trentaine d'années qu'il n'est pas aussi obtus ou négligent qu'on l'avait dit : certaines altérations ou corrections introduites par les copistes médiévaux, puis par les érudits des xvie-xviiie siècles doivent être révisées. On s'interroge aussi sur le sens de son entreprise : dans son intérêt quasi exclusif pour le passé ancien de la Grèce, n'y aurait-il pas le désir de conforter une identité menacée par la mondialisation romaine ? Ce guide très sélectif avait-il une orientation idéologique restée implicite ?

— Bernard HOLTZMANN

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française d'Athènes, professeur émérite d'archéologie grecque à l'université de Paris-X-Nanterre

Classification

Autres références

  • JEUX OLYMPIQUES - La renaissance des Jeux

    • Écrit par
    • 5 087 mots
    ...quatorze Olympiques, douze Pythiques, onze Néméennes et neuf Isthmiques. Le site d'Olympie est quant à lui essentiellement connu grâce à la Périégèse de la Grècede Pausanias (iie siècle après J.-C.), écrivain-voyageur qui le décrit dans l'un des deux livres de sa Périégèse...