PÉRIURBANISATION
Un processus controversé
Le processus de périurbanisation tel qu'il est engagé à l'échelle de la planète suscite un certain nombre de critiques, au prisme notamment du concept de développement durable. Le Livre vert sur l'environnement urbain publié par la Commission européenne (1990) définissait la forme optimale de la ville durable en stigmatisant l'impact négatif de l'étalement urbain sur le devenir des villes et en valorisant un modèle morphologique de ville compacte caractérisé par des densités élevées, un périmètre contenu et une forte mixité des usages du sol.
L'argument environnemental
Cette thèse met en évidence les problèmes environnementaux accrus par la périurbanisation : pollution atmosphérique due en particulier au gaz carbonique, causée par l'automobile, consommation énergétique, changements d'utilisation des sols et dégradation des ressources naturelles, dégradation paysagère. La consommation d'énergie relative au transport des habitants est fortement corrélée aux densités urbaines. Cette consommation augmente lorsque les densités urbaines diminuent. L'étalement augmente en outre la consommation d'eau et absorbe des espaces verts. Paradoxalement, la quête massive d'un meilleur cadre de vie entraînant l'étalement urbain conduit à la dégradation, voire à la destruction, de ce cadre fantasmé.
Des dangers spécifiques pour la santé peuvent survenir lorsque les régions périurbaines sont affectées simultanément à des activités agricoles et industrielles et à un usage résidentiel. Le cas de Bhopal, en Inde, représente un exemple extrême. Une usine chimique de l'Union Carbide est installée en 1978 à 5 kilomètres à l'extérieur de la ville, qui compte alors 300 000 habitants. Un quartier périurbain informel se développe autour de l'usine au début des années 1980, sans schéma d'urbanisation ni possibilité d'appliquer un système de gestion du risque industriel aux zones périphériques. En décembre 1984, à la suite d'un accident industriel majeur, un nuage mortel se répand sur les habitations.
Certaines zones périurbaines se transforment en puits à déchets urbains, liquides ou solides, et parfois à rejets aériens. Dans de nombreux pays en développement, l'implantation anarchique des populations et l'extension (par remblaiement) de quartiers dans des zones basses, inondables, théoriquement non constructibles, constituent une réponse aux problèmes fonciers et d'accès au logement, compte tenu de l'insuffisance de l'encadrement par les pouvoirs publics. Cette situation aggrave les problèmes de drainage des eaux pluviales et d'inondations dans ces zones, qui le plus souvent deviennent des foyers d'épidémies de choléra.
L'argument économique
La vulnérabilité du mode de développement périurbain au regard des questions énergétiques et économiques pose également question. L'élément sur lequel repose ce système de ville étalée est l'automobile. Or le coût de l'énergie et les niveaux de ressources ne sont pas stables. On peut donc s'interroger sur la viabilité à long terme du périurbain fondé sur une consommation sans limite de ressources spatiales, énergétiques et plus largement matérielles. L'analyse des conséquences économiques de l'étalement urbain est particulièrement complexe. Les formes urbaines, les densités et le type d'habitat ont aussi un impact sur les budgets publics locaux. L'étalement urbain est associé à des coûts publics d'équipement élevés, dans la mesure où il entraîne une extension des réseaux d'assainissement, de transport, d'approvisionnement en eau, en électricité, et que l'extension de la ville vers ses périphéries peut remettre en cause les économies d'échelle réalisées pour de nombreux services collectifs.[...]
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Écrit par
- Estelle DUCOM : maître de conférences en géographie, aménagement de l'espace et urbanisme à l'université de Paris-IV-Sorbonne, agrégée de géographie
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