PESTE
Le bacille de Yersin
Le bacille de Yersin (Yersinia pestis) appartient au genre Yersinia, après avoir longtemps été classé comme Pasteurella pestis. C’est un bacille court, ovoïde, à Gram négatif, immobile et non sporulé. Certaines de ses propriétés biochimiques ont un intérêt épidémiologique ; la fermentation du glycérol, par exemple, est liée à l’origine géographique des souches : celles de la variété continentale, qui provoquent cette fermentation, proviennent des foyers anciens (Mandchourie, Mongolie, sud-est de l’ex-URSS, Afrique centrale), alors que celles de la variété océanique ou orientale, qui ne provoquent pas cette fermentation, sont des souches isolées, disséminées dans le monde entier lors de la troisième pandémie. L’existence de foyers mixtes, où se rencontrent des souches capables d’entraîner la fermentation du glycérol et d‘autres qui n’ont pas cette propriété, témoigne de l’existence de plusieurs importations successives de la peste. De même, les souches de la variété continentale sont séparées en variétés antiqua et medievalis, selon qu’elles réduisent ou non les nitrates en nitrites, produisent ou non de l’acide nitreux et attaquent ou non le mélibiose.
Depuis 2001 et la détermination de la séquence de l’ADN du bacille, des études de biologie moléculaire ont révélé que le genre Yersinia comportait une souche ancestrale d’où ont émergé onze espèces, dont deux apparues relativement récemment (entre 0,5 et 2 millions d’années) sont des entérobactéries, Y. enteroliticaet Y. pseudotuberculosis. C’est de cette dernière espèce que Y. pestis aurait pris naissance il y a vingt mille ans au plus. La paléomicrobiologie documente la complexité de la migration du bacille avec les populations humaines. Le premier contact documenté en Europe occidentale (dans les actuels pays Baltes) remonte à environ quatre mille ans.
Par rapport à Y. pseudotuberculosis, Y. pestis se différencie par une perte de gènes, mais aussi par l’acquisition d’autres permettant le passage du germe chez l’animal vecteur, c’est-à-dire la puce. La comparaison des séquences ADN des génomes entiers obtenus de divers isolats, animaux ou humains, qui s’accumulent depuis 2001, montre une remarquable adaptabilité de la bactérie à des écosystèmes et des hôtes différents et, de manière plus générale, une grande plasticité des génomes. Ces modifications génétiques adaptatives peuvent elles-mêmes être à l’origine de différences dans le pouvoir pathogène de la bactérie.
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Écrit par
- Henri-Hubert MOLLARET : professeur émérite à la faculté de médecine de Paris, chef de service à l'Institut Pasteur
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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