LENNÉ PETER JOSEF (1789-1866)
Jardinier-paysagiste inspiré dont le nom reste lié au site exceptionnel de Potsdam (Allemagne), Peter Josef Lenné dota la Prusse d'un impressionnant ensemble de jardins où domine le style paysager. Ses idées sur les « parcs pour le peuple » (Volksgarten) ainsi que ses vastes projets urbanistiques pour Berlin ont conféré à la future capitale de l'Allemagne ce faciès de Ville verte qu'elle a conservé jusqu'au xxe siècle. Grâce aux monographies de Gerhard Hinz (Peter Josef Lenné. Landschaftsgestalter und Städtplaner, Göttingen, 1977) et de Harri Günther (Peter Josef Lenné. Garten, Parke, Landschaften, Berlin, 1985), on mesure mieux la largeur de conception et la diversité d'inspiration d'un artiste dont l'important corpus graphique révèle une sorte de topographe inspiré.
Issu d'une lignée d'ancêtres jardiniers depuis le xviie siècle, Lenné, dont le père était jardinier et botaniste à Brühl, se forma auprès de son oncle, Hans Clemens Weyhe, avant d'entreprendre une série de voyages pour parfaire ses connaissances. Après avoir parcouru l'Allemagne du Sud (1809), grâce aux relations établies par son père avec les autorités françaises lors de l'occupation napoléonienne, il put se rendre à Paris. Il travailla pendant un an auprès du botaniste André Thoin, administrateur du Muséum, et suivit les cours de l'architecte Durand à l'École polytechnique (1810). Il semble, comme en témoignent ses premières œuvres, avoir subi l'influence de Gabriel Thoin qui mettait alors au point le système de typologie des jardins qu'il devait publier en 1819 sous le titre de Plans raisonnés de toutes espèces de jardins. Il compléta sa formation en Suisse, puis en Autriche où, grâce au botaniste Josef Boos, il fut engagé à Schönbrunn. Ses premiers travaux officiels, projet de remaniement pour l'ensemble du parc de Laxenbourg et pour l'extension de la ville de Coblence, précèdent de peu son engagement au service du roi de Prusse, Frédéric-Guillaume III. C'est en effet en janvier 1816 que le maréchal von Malsein le nomma à l'Administration générale des jardins de Potsdam, dont il devait devenir le directeur en 1828. Dès lors, les nombreux aménagements et extensions qu'il mène, parfois en étroites relations avec l'architecte Karl Friedrich Schinkel, mobilisent une grande partie de son activité. On le voit cependant multiplier ses interventions dans de nombreuses propriétés de la région, pour des familiers du roi, finissant par donner sa marque à tout le paysage environnant. Pour le domaine royal, il dessine d'abord un plan d'ensemble pour les jardins du Nouveau Palais. Mais c'est surtout dans le domaine contigu de Charlottenhof, où le futur Frédéric-Guillaume IV fait construire un palais « à la romaine » par Schinkel, qu'il peut donner libre cours à son goût des vastes prairies piquées de boqueteaux et d'arbres isolés et parcourues par des sentiers courbes et des eaux sinueuses (à partir de 1826). Sous l'influence « classique » des jardins romains et plus encore de ceux de la Renaissance italienne (il voyage en Italie de 1844 à 1847), il se plaît à des organisations plus régulières, structurées par des berceaux de charmille et des parterres géométriques (Marlygarten, 1855 ; jardin nordique et jardin sicilien, 1860). Ainsi le magnifique ensemble de Potsdam, admirablement restauré et entretenu, témoigne aujourd'hui de l'intelligence d'un artiste qui respecta le dispositif baroque d'origine tout en le reliant subtilement à une série de nouveaux jardins, tantôt réguliers, tantôt paysagers. On retrouve cette volonté « d'intégration intelligente » à Schwerin (1840). Dans d'autres cas, le goût nouveau l'emporte, comme à Charlottenburg (Berlin) où les parterres cèdent la place à de vastes pelouses et où le bassin se transforme en lac,[...]
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Écrit par
- Monique MOSSER : ingénieur au C.N.R.S., enseignante à l'École nationale supérieure d'architecture de Versailles
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