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ZUMTHOR PETER (1943- )

L'architecte suisse Peter Zumthor est né le 26 avril 1943 à Bâle ; en 1963, il s'inscrit à la Kunstgewerbeschule, puis il étudie l'architecture et le design au Pratt Institute à New York (1966). À partir de 1968, il travaille au département pour la conservation des monuments des Grisons, canton qui deviendra son principal champ d'action. En 1978, il enseigne à l'université de Zurich où il transmet son expérience sur la protection du paysage et le contrôle de l'environnement, puis il fonde son agence, à Haldenstein, en 1979.

Sa première construction importante (1986), destinée à abriter le site archéologique romain de Chur (Coire), est constituée de simples parois en lames de bois filtrant la lumière. Avec cet édifice, il pose les principes essentiels de son œuvre : « lieu, matériau, énergie, présence, souvenir, mémoire, images, densité, atmosphère, permanence et concentration » ; telles sont les notions auxquelles Zumthor se réfère encore aujourd'hui lorsqu'il conçoit un projet. Son goût pour le bois se manifeste à nouveau dans la maison-atelier qu'il construit pour lui à Haldenstein en 1986, sobre boîte en bardage fermée sur trois façades au paysage, mais ouvrant largement sur un jardin intérieur. Il recourt au même matériau pour la structure de la petite chapelle Saint-Benoît à Sumvitg (1985-1988), édifice en forme de feuille, aménagé à flanc de coteau, ainsi que pour l'extension d'une ferme à Versam (maison Gugalun, 1990-1994).

La rigueur, voire l'austérité, de chacune de ces constructions est compensée par une savante mise en œuvre des matériaux, auxquels Zumthor confère d'exceptionnelles qualités expressives. Cette manière d'aborder le projet le rapproche incontestablement de ses compatriotes Jacques Herzog et Pierre de Meuron. Cette parenté se vérifie encore dans le centre pour personnes âgées de Chur (1989-1993), dont le rationalisme est souligné par l'emploi de la pierre de taille en façade, de même qu'avec l'ensemble de logements Spittelhof à Biel-Benken (canton de Bâle, 1989-1996) : pour ces trois bâtiments en L – l'un accueillant des appartements, les deux autres composés de maisons individuelles –, regroupés autour d'un jardin sur un terrain en pente, Zumthor mise en effet davantage sur une forte présence de l'architecture que sur une recherche typologique spécifique. Citant volontiers le texte de Martin Heidegger, « Bâtir Habiter Penser », l'architecte entend traduire des expériences d'habitation, des sensations d'être au monde aussi diverses qu'un parcours en forêt, la traversée d'un pont, le souvenir d'un lieu en été ou d'une chambre un soir de pluie.

Cette attitude phénoménologique, que Peter Zumthor exprime en architecture de manière extrêmement sensuelle, trouve un premier accomplissement avec les bains des thermes de Vals (1990-1996). Le travail sur le matériau y atteint alors un niveau paroxystique : spécialement conçue pour ce projet, la structure composite (parois en pierre et béton armé) est en fait un véritable monolithe, et non une juxtaposition ; l'appareillage des pierres, leur ton et le reflet de l'eau sur elles, ajoutés à l'ambiance vaporeuse des bains, confèrent une ambiance magique aux espaces intérieurs. Le projet, non réalisé, pour une église à Munich (1996) se fonde lui aussi sur une transcendance du matériau : en référence au ciel, à Dieu, mais aussi aux fresques de Giotto comme à l'œuvre d'Yves Klein, Zumthor proposait une nef aux murs uniformément bleus – il suggérait en outre une expérience sonore et spatiale inédite avec la création d'un double écho.

Sur les bords du lac de Constance à Bregenz, en Autriche (1990-1996), l'architecte joue encore pour le Kunsthaus sur la capacité de mutation des matériaux.[...]

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Écrit par

  • : professeur, université de Picardie Jules-Verne

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